Nationalisme et National-socialisme
NATIONALISME ET NATIONAL-SOCIALISME
(Texte initialement publié le 17-Jan-2021.)
Iñaki Aginaga
La nouvelle offensive du Nationalisme
espagnol dans les Territoires basques occupés obéit à des causes et des
circonstances bien déterminées. La classe dirigeante considère que:
1/ Le plan d’adaptation et de
stabilisation du régime Franquiste a été réalisé dans ses grandes lignes.
2/ Le risque de fracture a disparu de
la société espagnole, dès lors que l’ancienne opposition s’est ralliée aux
vainqueurs, et elle aspire seulement à se rendre utile et à obtenir sa juste part
dans l’assiette au beurre.
3/ Le “problème basque” est sous
contrôle, la Résistance nationale étant maintenue au niveau infrastratégique
avec le concours direct ou indirect, acheté ou récupéré, du conglomérat
Pnv-Eta.
4/ L’opposition et la conscience
nationales du Peuple Basque n’ont pas pour autant disparu ni même diminué,
“comme elles auraient dû le faire”, sous le monopole de la violence, le Terrorisme
d'Etat, le conditionnement idéologique, la soumission économique, la corruption
administrative, la “centralisation autonomique”, la répression exaspérée de
toutes les libertés et – avant tout – du droit fondamental de libre disposition
ou autodétermination de tous les Peuples: premier des droits humains fondamentaux
et condition préalable de tous les autres.
5/ Si l’actuelle absence de stratégie
et de classe politique condamne l’opposition démocratique du pays occupé à l’inefficacité
et aux ersatz de résistance politique, on ne saurait garantir qu’une nouvelle
situation ne pourrait se produire qui modifierait la distorsion entre base
sociale, classe politique et stratégie, modifiant par là-même le rapport de
forces établi.
6/ Les conditions de possibilité,
nécessité et urgence absolue sont ainsi réunies pour poser une nouvelle
offensive destinée à briser les reins - avant qu’il ne soit trop tard - aux
forces de liberté que la guerre et la dictature du Général Franco et de ses
héritiers ne sont pas parvenues à éradiquer.
Cependant, ce qui attire ici cependant notre
attention c’est le comportement des Nationalistes français, qui ont
immédiatement emboîté le pas à leurs alliés les espagnols. Les Espagnols
méprisent et détestent les Français. Les Français méprisent trop les Espagnols
pour les détester. (Ils en arrivent même à croire qu’ils les aiment et qu’ils
en sont aimés: syndrome habituel des races, peuples ou classes de seigneurs et
aristocrates envers leurs inférieurs, esclaves et serviteurs.) Mais leur
objectif commun: la liquidation du Peuple Basque, oblige Espagnols et Français
à surmonter leur dégout mutuel et à collaborer. À cet égard, nous nous
concentrerons spécifiquement sur l’attitude des National-socialistes/communistes
françaises.
I
“Je suis antinationaliste, de la même
façon que d’autres sont anticapitalistes. Comme le disait Jaurès, dans mon
opinion le nationalisme porte en soi la violence comme les nuages portent la
tempête. Il n’y a pas de nationalistes durs ou modérés, il n’y a que des
nationalistes et c’est tout, et il faut les isoler. Le nationalisme est la
peste de la bourgeoisie basque. Je ne dénie pas à ces gens le droit de penser
différemment; je leur dénie le droit à la violence. Celui qui prend une arme
connaît les risques; qu’il les accepte et c’est tout, et qu’il n’envoie pas les
gens pleurer ou manifester. Ils se diront de gauche mais ils s’allient au RPR.
Ils me font exploser de rire. Ils ne sont que des nationalistes et c’est tout.
“Nous ne devons pas oublier que Hitler
arriva au pouvoir par la voie démocratique. Les municipalités sont la base de
la démocratie et des institutions républicaines. Les nationalistes entrent dans
les municipalités pour pervertir les fondements de la démocratie française,
pour mettre en doute l’unité de
“J’ai toujours fait le choix de la
fidélité aux valeurs démocratiques, du contact permanent avec le terrain et du
parler vraie. C’est aussi faire le choix d’une certaine éthique politique. Dans
la clarté, toujours dans la clarté. La vie politique doit être claire. Je
refuse le double langage. Nous condamnons l’alliance de la majorité sortante et
des nationalistes. Nous n’acceptons pas les compromissions électoralistes et le
double langage de certains. Lorsque je vois les candidats RPR et UDF avec les
nationalistes, j'y vois des alliances contre nature. Lorsqu’elle s’est
fourvoyée dans une alliance avec le PNV et les abertzales [sic], la droite
angloaye a mis entre parenthèse les principes républicains et joué à l’apprenti
sorcier. Vous êtes nombreux à vous en inquiéter. [Cfr. Maitia: ‘Dei berezi
bat luzatzen die abertzaleei, elgarrekin lan egin behar dutela geroari buruz’.]
“Si vous voulez absolument sur le plan
national que tous les pouvoirs de décision soient concentrés dans les mains du
parti unique de Chirac, alors confiez votre avenir et celui de tous vos proches
pendant 5 longues années dans les seules mains de Chirac et de son parti
unique. Dimanche 16 Juin vous avez l’occasion de rompre avec cette logique
antisociale et antidémocratique en votant: Espilondo.” (Quelques jours plus
tard: “Le premier tour de l’élection présidentielle nous a plongées dans
l’inquiétude. Vous êtes sans doute nombreux à avoir été comme moi surpris et
atterrés par la menace d’extrémisme et d’intolérance qu’il faisait planer.”
Conclusion logique – et pratique: “Concentrer les votes pour la droite”.)
“Je suis révulsé par de tels propos.
[Il s’agit là des propos et des affiches traitant Espilondo d’anti-Basque, et
de Fascistes à la croix gammée les agents du Nationalisme franco-espagnol.] Je
ne peux que constater cette monté irrationnelle de la haine de l’autre. Nous
devons être méfiants. Nous devons nous méfier de ceux qui répandent des idées
de haine. Notre circonscription est le témoin de faits multiples, contraires
aux valeurs républicaines, commis au nom d’un certain nationalisme basque. Ces
faits sèment la division, le conflit et la haine parmi nous. Quel gâchis!
J’aime à dire que je suis ‘sur d’être basque et fier d’être français’. Ouvrons
plutôt, ensemble, pour la paix, pour la fraternité et pour une action
culturelle audacieuse et de qualité. [Ç’est à dire, française.]
“La langue basque fera des progrès quand elle ne sera plus sous la coupe des nationalistes: la langue basque ne doit pas être séquestrée par personne. [Cfr. Sarkozy: ‘Retenez bien ceci: Plus la langue basque se tiendra éloignée de la politique, et mieux se portera’.] Le basque a disparu parce que les gens ne lui trouvaient aucune valeur. Certains disent que parler basque était pénalisé. Pourtant mes parents tenaient un commerce à Mauleon et là tous parlaient en basque comme ils le voulaient. L'égalité demande une langue que connaissent tous. Dire que le basque doit être dans les Services Publics montre une claire connotation politique. Sera-t-il sauvé en l’enseignant? Le latin et le grec sont enseignés et voyez dans quel état ils sont! Je suis absolument contraire à l’officialisation de la langue basque. En plus, cela ne changerait rien. Allons-nous mettre à Anglet un fonctionnaire parlant le basque pour dix malheureux Basques? Une solution peut être d'obliger massivement la population à le parler; mais je crains que derrière ces mesures sérient les objectifs nationalistes. Je ne suis pas d'accord pour enfermer le basque dans un ghetto communitaire. L'Education Nationale s'est montrée très ouverte. Seaska ne l'accepte pas parce qu'il joue avec une perspective politique.” (L’Education Nationale et Espilondo lui-même ne l’ont pas? L’impérialisme a une autre vision politique, bien sûr, qui vise à liquider la langue du pays occupé.)
Ainsi parle Espilondo, porte-parole, théoricien et représentant du Parti ‘socialiste’ Français (PsF) et de la “gauche plurielle” nationaliste, comme le font ses alliés nationalistes écolo-communistes. Pourquoi pas, si c’est pour bien faire?
“Quoique” d’origine
basque, le nouveau théoricien local et porte-parole attitré du PsF n’est pas ou
n’est plus un rustre ou un ignorant. En assumant avec toutes les conséquences
le nationalisme et la culture de la nation dominante il ne s’est pas simplement
comporté en personne avisée et soucieuse de son avenir: il est aussi devenu un
homme cultivé, il a lu des bouquins et tout et, bien entendu, connaît sur le
bout des doigts ses classiques, les grands classiques du national-socialisme
français. On y reviendra, sur les textes “de Jaurès” et sur le reste.
Son collègue Labarrère ajoute: “Le Ps
condamne le terrorisme de toutes origines. Il faut se farcir les basques. Si on
leur donne un département, ils buteront leur préfet. La voie démocratique la
plus large permet l’expression de tous par le droit de vote”. (Le sénateur
Moulin, son collègue, désignait Labarrère comme le plus remarquable ringard au
“temple des ringards” que la Haute Assemblée risquait de devenir.)
Si le PsF collait à la ligne du PsoE:
qui se confondait avec le parti franquiste au pouvoir, le Parti ‘communiste’
Français (PcF) ne pouvait pas prendre du retard sur les ci-devant
sociaux-traîtres et sociaux-chauvins du PsF, dont il avait adopté, en les
dépassant, toutes les idées les plus réactionnaires. Mais, pour fonder et
justifier leur soutien sans réserve au Nationalisme impérialiste et au Terrorisme
d’Etat françaises, sa bureaucratie ne pouvait toutefois en référer aux “textes”
du social-opportuniste bourgeois Jaurès, même extrapolés, détournés et
falsifiés par Espilondo. Moins encore – et pour cause – à l’autorité toujours
gênante et désormais peu recommandable de Lénine.
“Les communistes condamnent avec
vigueur le terrorisme, les assassinats et le racket pratiqués par l’Eta. Durant
les sommets de Biarritz et de Nice les nationalistes basques se sont livrés à
des violences inadmissibles, en particulier en profanant le monument aux morts
d’Anglet. Les nationalistes refusent de condamner les actes de l’Eta. Le
nationalisme est un danger. Les nationalistes, ici comme ailleurs en Europe et
dans le monde, visent à faire de l’autre un étranger, un ennemi. Il y aurait
les ‘purs’, qui adoptent le projet indépendantiste, et les autres (y compris
basques) qui sont voués à être des cibles. C’est en cela que le nationalisme
est dangereux parce qu’il s’apparente au fascisme. Les indépendantistes ne sont
pas de gauche; ils sont d’extrême droite. Dès lors, nous dénonçons les alliances
douteuses entre les nationalistes et les maires de droite. Avec Camblong c’est
pire qu’avec la droite. Les communistes continueront avec beaucoup d’autres à
combattre le nationalisme, le terrorisme. Ils persisteront à agir pour la paix,
pour un Pays Basque heureux, pour promouvoir la culture basque dans son
ensemble (langue, sport, art culinaire etc...)”, dit le PcF, toujours
incorruptible ennemi de la liberté des peuples. (On y reviendra aussi.)
Maintenant que “les ours savants, les
chacals, les tartuffes hideux, nauséabonds et répulsifs, les chiens enragés,
les reptiles répugnants, les rats visqueux et les vipères lubriques fascistes,
social-démocrates et trostkystes-boukharinistes” ne font plus l'affaire, le PcF
se concentre sur les “nationalistes” basques, corps étranger susceptible de
polariser le Nationalisme exclusif, haineux et xénophobe qui a toujours inspiré
et vitalisé le colonialisme français.
Et lorsque le mouvement national-écologiste
français s’est incorporé à la coalition il savait aussi où il se fourrait.
Ecologie et nationalisme français sont désormais la même chose. Il n’y a pas de
place pour la liberté des Peuples dans l’écosystème fasciste.
II
La mise à contribution des “allogènes russifiés” dont parlait Lénine, qui sont censés connaître le terrain et “forcent la note en l’occurrence”, est aussi de tous les temps et dans tous les pays occupés. Convertis, néophytes, soumis, vendus et renégats de tout poil vont toujours plus loin que leurs maîtres et modèles dans les tâches qui leur sont imparties.
L’allogène russifié “lâche dédaigneusement des accusations de ‘social-nationalisme’; alors qu’il est lui-même non seulement un vrai, un authentique ‘social-national’ mais aussi un brutal argousin grand-russe”. L’allogène francisé lâche dédaigneusement des accusations de nationalisme à l’encontre des nationaux de la nation opprimée; alors qu’il est lui-même non seulement un vrai, un authentique nationaliste mais aussi un brutal oppresseur au service de la nation dominante.
Le mépris et la haine toute naturelle des Nationalistes envers les Peuples opprimés, se trouvent encore renforcés chez les renégats par la rancune, les complexes et les implexes spécifiques de leur psychologie propre. Le mépris passif et le mépris de soi sont l'adaptation du colonisé au mépris du colonisateur. Pour la mentalité impérialiste le “portrait du colonisé” est le “portrait du colonisateur” en négatif. Le colonisateur est l’inverse positif du colonisé.
Or, selon Memmi, “La première tentative du colonisé est de changer de condition en changeant de peau. Un modèle tentateur et tout proche s’offre et s’impose à lui: précisément celui du colonisateur. [...] L’ambition première du colonisé sera d’égaler ce modèle prestigieux, de lui ressembler jusqu’à disparaître en lui. [...] L’amour du colonisateur est sous-tendu d’un ensemble de sentiments qui vont de la honte à la haine de soi. L’outrance dans cette soumission au modèle est déjà révélatrice. [...] Le colonisé ne cherche pas seulement à s’enrichir des vertus du colonisateur. Au nom de ce qu’il souhaite devenir il s’acharne à s’appauvrir, à s’arracher de lui-même. [...] L’écrasement du colonisé est compris dans les valeurs colonisatrices. Lorsque le colonisé adopte ces valeurs il adopte en inclusion sa propre condamnation. Pour se libérer – du moins le croit-il – il accepte de se détruire. Le phénomène est comparable à la négrophobie du nègre, ou à l’antisémitisme du juif.” Il en résulte “l’effort obstiné du colonisé à surmonter le mépris que méritent son arriération, sa faiblesse, son – il finit par l’admettre – altérité; sa soumission admirative, son souci appliqué de se confondre avec le colonisateur, de s’habiller comme lui, de parler, de se conduire comme lui”. (Albert Memmi; ‘Portrait du colonisé, précédé du portrait du colonisateur’, 1957.)
Le Nationaliste espagnol ou français de souche
part d’un sentiment “positif” envers “la puissance et la grandeur” de son pays ; ce qui induit en lui un sentiment négatif de mépris et de haine envers le
peuple dominé, qu’il perçoit en tant qu’obstacle, corps résistant à son propre
“développement”. Le Renégat part d’un sentiment négatif envers son pays
d’origine, dont dérive un sentiment “positif” envers le peuple “supérieur”
susceptible de l’arracher à ses misérables racines, en arrachant aussi pour
plus de sécurité les racines et la terre. Le nationaliste français de souche
est français d’abord; anti-basque par voie de conséquence. Le Renégat est
anti-basque avant tout, français ensuite. Il deviendrait n’importe quoi
d’autre, pourvu qu’une quelconque puissance lui paraisse en mesure de détruire
ce pays d’origine dont la liquidation est pour lui condition nécessaire de
normalisation, justification et récupération culturelle, psychologique et
sociologique.
“Gilbert Folliot, prudent : L’amitié du roi
pour Thomas Becket est morte, Altesse ?
“Roi Henri II : Soudainement, évêque. Une sorte
d’arrêt du cœur. [...] Je hais Becket, évêque, maintenant. Entre cet homme et moi,
il n’y a plus rien de commun que cette bête qui me laboure le ventre. Je n’en
puis plus. Il faut que je la lâche sur lui. Mais je suis le roi, [et] ce qu’il
est convenu d’appeler ma grandeur m’embarrasse : je besoin de quelqu’un.
[...] On trompe quelquefois sur les hommes, évêque. Moi, aussi, je me suis
trompé. (Il crie soudain : ) Ô mon Thomas !
“Gilbert Folliot, s’écrie : Vous l’aimez,
Altesse ! Vous l’aimez encore. Vous aimez ce porc mitré, cet imposteur, ce
bâtard saxon, ce petit voyou !
“Roi Henri II lui saute dessus, criant :
Oui, je l’aime ! Mais ça ne te regarde pas, curé. Je ne t’ai confié que ma
haine. Je vais te payer pour m’en défaire, mais ne me dis jamais du mal de
lui ! (Jean Anouilh; ‘Becket, ou l’Honneur de Dieu’, 1959.)
La haine, si apparente et
caractéristique chez les renégats, est le résultant de ressentiments, de
déceptions, de frustrations, de complexes œdipiens ou autres dont on rend
responsable le pays d’origine. “La agression physique et la volonté de détruire
ne sont pas la seule réplique à la frustration, mais sont une des répliques possibles
et peut-être la réplique spontané.” “Il existe un mécanisme de comportement
bien différent de celui de la agression. C’est la haine, ce vilain petit frère
du grand amour.” “Probablement on ne peut vraiment haïr que là où on a aimé et
où, en dépit des toutes les dénégations, on aime toujours.” “Phénomène
remarquable, généralement peu connu des profanes, qu’on appelle ‘ambivalence
affective’. Une des manifestations de cette ambivalence est représentée par la
coexistence très fréquente, chez la même personne, d’un amour intense et d’une
haine violente. A cette observation la psychanalyse ajoute que ces deux
sentiments opposés se portent en outre fréquemment sur le même objet.” “Ce qui
il y a de primitif dans notre vie psychique est, au sens littéral du mot,
impérissable.”
Ce n’est que de façon inadéquate que
certains font usage à ce propos des termes comme “collaboration-collaborationniste”.
Bonnard, Bousquet, Brasillach, Brinon, Bucard, Cousteau, Darnand, Déat,
Deloncle, Doriot, Drieu, Laval, Luchaire, Pétain, Rebatet, Suarez et tant
d'autres ont été des Collaborationnistes, et fiers de l'être. Eux aussi ont légitimé
et renforcé l'occupation militaire, et participé à la répression dans leur
propre pays ; mais ils n'ont jamais prétendu que c'était là un régime
démocratique, non-Nationaliste et non-violent. Ils n'ont jamais essayé de
démembrer leur pays au profit des Etats voisins, comme le font les Renégats
“basques”. Ils n'ont jamais voulu l'annexer au Reich. Ils ont
même pensé et dit qu'ils savaient et pouvaient manier et berner les occupants
au profit de la France, à fin de conserver l'empire français sous protectorat
allemand.
Ils n'ont jamais dit que les Français
étaient des Allemands, ou que les Allemands étaient en France des Français
“avec une sensibilité différente” ; ni que leur Parti National
Socialiste des Travailleurs Allemands était en France un parti aussi
français, légitime et démocratique que les autres. Ils n'ont jamais qualifié la
langue allemande de langue de la République, et le dialecte français de langue
régionale faisant partie du patrimoine allemand. Ils n'ont jamais obligé les
enfants des écoles à chanter “Deutschland über alles” en hommage à leurs
ancêtres les Teutons, devant des monuments à la gloire de la Wehrmacht. Ce serait
leur faire affront que de mettre ces Collaborationnistes dans le même sac où
sont les Traîtres et Renégats “basques” qui, dans les Territoires occupés du
Peuple Basque, font carrière en s'affairant délibérément et en toute conscience
à la liquidation pure et simple de leur Peuple d'origine, et à
l’acceptation : comme s’ils étaient les leurs, des Peuples et Parties des
Nations dominants; tout comme le font les autochtones membres de la
bureaucratie liquidationniste Pnv-Eta et des partis Nationaux-impérialistes français
et espagnols. Il ne faut pas mélanger les genres, en mettant
Collaborationnistes et Traitres/Renégats dans le même panier.
III
Ce que disent ici et maintenant
Espilondo, Maitia et Borda, ce que les monopoles médiatiques diffusent
aujourd’hui, à l’abri de toute contestation possible, c’est la même chose que
le National-socialisme traditionnel a toujours dit: on l’avait entendu partout
où les impérialismes français et espagnol ont mené sa criminelle entreprise à
l’encontre de la liberté des Peuples. Surtout lorsque les partis “de gauche”
remplissent leur mission spécifique en allant jusqu’au bout des tâches que la
droite et l’extrême droite officielles abandonnaient en de si bonnes mains. Or,
partout, la “gauche” nationaliste a su prendre la tête de la répression et de
la guerre contre le “nationalisme” des autres, c’est à dire contre la liberté
des Peuples.
Depuis la décomposition du despotisme
oriental en Espagne, sous les coups de l'invasion française, la classe
dirigeante s'efforce de suivre le modèle français; mais les tendances et les
initiatives du nationalisme espagnol sont de plus en plus étroitement suivies à
la lettre par leurs alliés du Nord. Or, si au Maroc de l’expansion impérialiste
européenne l’impérialisme espagnol jouait le rôle de sous-locataire de
l’impérialisme français, c’est ici le colonialisme français qui fait figure de
parent pauvre du colonialisme espagnol, dont il assume le rôle complémentaire,
et assure les services auxiliaires de répression, propagande et appui
logistique; bien content de ramasser les retombées d'une aussi glorieuse
entreprise.
Comme suite aux initiatives du pouvoir
franquiste, le Nationalisme impérialiste “de gauche” français a montré de
nouveau sa vraie nature; ce que n’implique pas sur le fond un apport novateur
quelconque. Ministres et journalistes français répètent comme des perroquets
les dernières trouvailles fascistes et xénophobes qu’ils viennent d’entendre ou
de lire auprès des ministres et des journalistes espagnols. On reconnaît
aisément, dans les insultes, les mensonges ou les paralogismes de la clique Nationaliste
d’Anglet, les thèmes et les méthodes idéologiques favoris de la clique Nationaliste
d’Ermua, du parti franquiste officiel et de ses comparses National-socialistes
espagnols du PsoE. C’est toujours le même vomi.
De quelque côté qu’on prenne ces
concepts, quel que soit la façon dont on leur étudie, leur seul élément
univoque, actif et significatif c’est le Nationalisme français, c’est la
démagogie et le chauvinisme petit-bourgeois au service de l’impérialisme
étatique de la grande bourgeoisie nationaliste. Il s’agit avant tout d’un
effort pour cacher les fondements du régime impérialiste imposé – à travers des
siècles de violence, de guerre et d’occupation – par le terrorisme, la
répression et la déportation. Il s’agit de fausser et ruiner en théorie et en
pratique le droit humain fondamental de libre disposition des Peuples :
premier des droits humains et condition préalable de tous les autres, sans
lequel liberté et démocratie sont des farces idéologiques au service de
l’impérialisme. C’est la tâche prioritaire des idéologues et politiciens des
partis nationalistes au pouvoir.
L'idéologie nationaliste-impérialiste
ne vise pas la vérité ou la connaissance mais la domination sur les Peuples et
la disparition des personnes libres. Plus les patients seront bêtes et plus ils
seront faibles et plus ils seront soumis. Il suffit de constater l'ampleur des
dégâts sur une opinion publique sans défense pour mesurer la redoutable
efficacité dont font preuve les services de conditionnement monopoliste des
masses. Transformer les personnes en pantins serviles, soumis et dépendants,
aux réflexes politiques émoussés et conditionnés, en aliénés sociaux et mentaux
aux cerveaux lobotomisés, lavés, vidangés, rembourrés et recyclés, c'est
l'objectif du système impérialiste de conditionnement idéologique.
Toujours aussi équivoque et
malhonnête, délibérément truquée et trafiquée, la nouvelle vague de propagande
nationaliste vise à tromper les patients à l’abri des monopoles étatiques de
violence et d'intoxication de masse. Il n’y a pas là matière à étonnement ou
prétexte à scandale: le nationalisme-impérialisme n’a que faire d’une
quelconque “honnêteté” idéologique. L’impérialisme est une entreprise
criminelle de domination nationaliste contre la liberté des Peuples, fondée et
établie par la violence, qui se réalise aussi idéologiquement, y compris par la
confusion, le mensonge, la dissimulation et la calomnie. Les Nationalistes
français “de gauche” sont allés sur cette voie aussi loin qu’il est possible
aller. Ils ont débordé les techniques d'usage dans leur “droite” officielle.
Ils ont adopté et adapté la propagande nationaliste du parti franquiste officiel
espagnol et de ses comparses National-socialistes du PsoE.
L'impérialisme ne peut pas montrer
devant tous la vraie nature de ce pouvoir, l’origine et le fondement de sa
“légalité” et de sa “légitimité”. Il doit dissimuler et fausser la réalité, les
sources, les finalités et les moyens du système de domination nationaliste dans
les territoires occupés et annexés, le fond des problèmes dont il est la cause.
Le pouvoir établi par au moyen de la
guerre, le Terrorisme de guerre et d’État, et la loi du plus fort cyniquement
affirmée ; par l'occupation militaire, la conculcation criminelle des
droits fondamentaux et historiques, et le mépris du droit international de
libre disposition des Peuples (premier des droits humains et condition
préalable de tous les autres) ; et par l'agression contre l'intégrité et
l'indépendance des Etats légitimes et historiquement constitués, la destruction
de leurs caractères nationaux par la violence et l'import-export des
populations, et la mainmise sur l'économie et la culture: tout cela sont ces
faits historiques et sociologiques qui sont à la base du présent régime
politique d'occupation militaire impérialiste français-espagnole contre le
Peuple Basque et son État : le Royaume de Navarre, et qui conditionnent et
ordonnent toutes ses formes. Des faits que l'idéologie nationaliste ne peut pas
assumer et qu'elle doit nécessairement arracher des consciences.
A leur place, l'impérialisme doit
faire entrer et enraciner dans les consciences l’idée de la nation dominante
une et unique; l'origine et le fondement démocratiques, non-violents et
non-nationalistes de l'occupation coloniale; la légitimité de l'Etat qui en est
l'auteur et le bénéficiaire. Il doit réduire au néant, dans l'idée, la nation
et l'Etat subjugués; présenter la résistance démocratique de tous ceux qui ne
rampent pas devant le nationalisme impérialiste comme fasciste, agressive,
violente et nationaliste; salir et diffamer tout ce qui reste de liberté, de
dignité et d'esprit d'indépendance chez le peuple opprimé. Lourde tâche, même
si tout est possible là où le monopole de la violence établit et assure le
monopole idéologique !
L'endoctrinement des masses est
d'autant plus efficace que connaissance, science, culture, enseignement,
information et communication, administrativement réprimées et dirigées, ne font
qu'un avec la propagande et le conditionnement psychologique des masses au
service des intérêts du gouvernement; que ses idéologues et
agents-fonctionnaires assènent la pensée unique et exclusive alors que toute
critique et toute donnée objective se trouvent écartées par la violence, la
peur, l'ignorance et la corruption; et que la prétendue opposition se charge de
dire ce que le pouvoir souhaite qu'on dise.
Les monopoles administratifs
s'évertuent à occuper et saturer l'espace audiovisuel, à produire le bruit et
les nuages de fumée rendant impossible toute communication susceptible de
faciliter la prise de conscience des populations sur les vraies questions et
les vraies responsabilités. Le conditionnement des masses doit aussi brouiller
et étourdir les consciences, empêcher toute pensée indépendante et critique de
s'exprimer: tant ses promoteurs sont convaincus de leur incapacité (théorique)
pour affronter la plus élémentaire vérité historique et politique. Leur action
cherche à boucher les trous par où pourrait s'infiltrer un reste d'information
et de connaissance, même les plus immédiates et élémentaires, sur la réalité du
pouvoir que le nationalisme français, avec l'inestimable concours de son partenaire
espagnol, exerce sur la Nation Basque.
“Parce que – vous le savez bien –
nous, qui sommes le parti agresseur, nous devons rester distant de l’examen
strict, et couvrir toutes les lumières, chaque meurtrière où l’œil de la raison
peut nous fouiller.” (W. Shakespeare; King Henry IV, Pt. 1.)
Si les Nationalistes parlent et
agissent ainsi c'est qu'ils peuvent le faire, et qu'ils ne peuvent pas faire
autrement. Bien entendu, ils aimeraient bien ne pas être “obligés” de procéder
de la sorte. Ils aimeraient mieux fonder idéologiquement leur domination sur la
libre adhésion des populations et sur le respect du droit de libre disposition
des peuples. Ils voudraient bien établir l'idée de leur empire national sur
l'histoire authentique et sur les données sociologiques, bien mieux que sur
l’irrationalité, les mythes, les apologies mensongères ou les pétitions de
principe dont ils ont gavé de force des populations sans défense. Ils
préféreraient utiliser la persuasion, le dialogue, le discours rationnel et le
langage clair – qu'ils doivent à tout prix éviter – au lieu du monologue imposé
et du terrorisme idéologique et politique dont ils ne peuvent se passer. Mais
le système impérialiste est un tout. Ses défenseurs sont des gens sérieux. Ils
ne se font pas d'illusion sur son compte, ils n'ont pas le choix, ils savent de
quoi il en retourne. Sans les monopoles politiques, économiques et idéologiques
qu'ils se sont octroyés et qu'ils ont imposés aux autres c'en est fait de leur
domination! Après des années et des siècles de monopole des moyens de violence,
de lavage de cerveau, de propagande, d’endoctrinement et d’intoxication, le
nationalisme français n’est pas en mesure d’avouer aux peuples ce qu’il est
réellement et de quoi vraiment son pouvoir est fait.
Les injures, les insultes, les propos
diffamatoires que les agitateurs nationalistes sont de plus en plus obligés
d'utiliser, visent avant tout à prendre l'initiative et á porter l'offensive
idéologique sur le terrain de l'adversaire; à faire diversion pour dévier
l'attention de l'opinion du fond des problèmes. Les provocations nationalistes
cherchent à détourner la résistance démocratique de ses tâches réelles; à
fixer, neutraliser et user l'adversaire. Pour cela la supériorité du nombre et
des moyens, la simple masse idéologique et même la faiblesse et la stupidité de
la pensée constituent des atouts de plus en plus efficaces, en face de
populations sans défense, abêties par des siècles de propagande à sens unique.
Si on a cependant reproduit ce
ramassis d'injures, de mensonges, d'infamies et de propos utilement débiles,
caractéristiques de la propagande et du terrorisme idéologique fascistes e
impérialistes, c'est d'abord parce qu'ils mettent à découvert de façon
remarquable la haine du Peuple basque, de la liberté nationale et de la
démocratie, et le mépris total de la vérité historique, sociologique ou
politique qui animent les partis nationalistes. Il s'agit pour eux de procéder
au conditionnement de leur clientèle réelle, actuelle ou virtuelle; de
canaliser et développer la haine, l'agressivité et les réflexes xénophobes et
chauvins contre le Peuple basque.
Propagande et guerre psychologique,
ruine de la mémoire historique et de la conscience collective des Peuples,
dogmatisme et obscurantisme, destruction de la raison, détournement, confusion
et perversion du langage et des concepts, annihilation du sens critique,
conditionnement, lavage de cerveau, endoctrinement, bourrage de crâne et
intoxication de masse font un ensemble inhérent à l'idéologie impérialiste dont
aucun élément n'est superflu. C'est l'expression de la domination sociale et du
monopole de la violence mis en place.
Sans “l’effroyable machine, l’effroyable imposture et l’effroyable mensonge” ainsi développées, la liquidation théorique et pratique du droit de libre disposition des Peuples ne pourrait pas être réalisée.
IV
“Je suis
anti-nationaliste”, dit Espilondo. Jouer délibérément sur l’ambiguïté voulue
des termes et des concepts, à fin de faire le transfert des crimes du
Nationalisme impérialiste sur le compte du “nationalisme” des colonisés, voilà
à quoi en est réduite l'idéologie dominante. Espilondo ne se gêne pour fausser
délibérément des textes de Jaurès, pourtant univoques, dans la mesure où ça lui
permet de cautionner son Nationalisme français et sa bascophobie. C’est comme
ça qu’il entend son “choix d’une certaine éthique politique”. Malgré les
monopoles de tous les moyens de violence et de propagande dont ils disposent,
il faut qu’Espilondo, son parti et sa clientèle soient à court d’idées pour
justifier leurs agressions, puisqu’ils doivent faire recours à des semblables
procédés. II faut aussi qu’ils soient persuadés que l’œuvre de déculturation et
idiotisassions des vaincus a atteint le niveau nécessaire pour leur faire
avaler n’importe quoi.
Si par
‘nationalisme’ au sens strict (c’est-à-dire: le Nationalisme impérialiste) on
entend le refus des droits des autres Peuples, ainsi que la propagande et les
voies de fait contre leurs libertés et – en premier lieu – contre leur droit de
libre disposition ou Independence, alors le Nationalisme est certainement
incompatible avec la liberté, avec les droits humains et avec la démocratie. En
ce sens, cependant, il est clair qu’une telle chose: le “Nationalisme basque”,
ça n’existe pas. Par contre, le Nationalisme français et l’espagnol existent
dans ce sens, et ils ont même été, pendant des siècles, au sommet de
l’impérialisme mondial. S’ils ne le sont plus, ce n’est pas parce que les
Espagnols et les Français n’aient jamais renoncé volontairement à cette
position, mais que la “faute” incombe aux autres “nationalismes”, qui sont
devenus à leurs tours plus forts qu’eux.
Mais si, au
contraire, on entend par ‘nationalisme’ la défense des Peuples, de leur
libertés et – d’abord – de leur droit de libre disposition ou
autodétermination : premier des droits humains fondamentaux et condition
préalable de tous les autres selon la loi internationale, alors toute société
libre et démocratique est fondée: idéologiquement et politiquement, de cette
façon. C’est-à-dire, si ceux qui veulent libérer leur Pays, leur
Nation et leur État de la domination impérialiste sont des “nationalistes”,
alors ceux qui envahissent les Pays et les Etats des autres Peuples, leur
refusant le droit fondamental de libre disposition nationale, sont des
Nationalistes au plus haut degré.
En d’autres
termes : si par ‘nationalisme’ on entend une quelconque prise en compte
factuelle ou idéale des réalités nationales, alors tout le monde est
“nationaliste”, et on ne voit pas comment on pourrait faire autrement. “La
culture internationale n’est pas a-nationale”, confirmait Lénine, qui n'avait
jamais rencontré personne parlant “socialiste” au lieu de Russe, Allemand ou
autres langues courantes, et n'espérait sans doute pas le rencontrer, et pour
cause.
Lénine disait et
répétait qu’il fallait en tout état de cause faire la différence entre “le
nationalisme de la nation opprimée, et le nationalisme de la nation qui
opprime”. Bien entendu la “gauche” Nationaliste française ou espagnole n’est
pas marxiste-léniniste: on éclaterait de rire si elle le prétendait. Elles se
situent, d’emblée, du côté du Nationalisme de la nation qui opprime, et contre
le “nationalisme” de la nation opprimée :
“J’ai déjà écrit dans mes ouvrages sur la question nationale qu’il est tout à fait vain de poser dans l’abstrait la question du nationalisme en général. Il faut distinguer entre le nationalisme de la nation qui opprime et celui de la nation opprimée, entre le nationalisme d’une grande nation et celui d’une petite nation.
“Par rapport au second nationalisme, nous, les nationaux d’une grande nation, nous nous rendons presque toujours coupables, à travers l’histoire, d’une infinité de violences, et même plus, nous commettons une infinité d’injustices et d’exactions sans nous en apercevoir. Il n’est que d’évoquer mes souvenirs de la Volga sur la façon dont on traite chez nous les allogènes : le Polonais, le Tatar, l’Ukrainien, le Géorgien et les autres allogènes du Caucase ne s’entendent appeler respectivement que par des sobriquets péjoratifs, tels ‘Poliatchichka’, ‘Kniaz’, ‘Khokhol’, ‘Kapkazski tchélovek’.
“Aussi l’internationalisme du côté de la nation qui opprime ou de la nation dite ‘grande’ (encore qu’elle ne soit grande que par ses violences, grande simplement comme l’est, par exemple, l’argousin) doit-il consister non seulement dans le respect de l’égalité formelle des nations, mais encore dans une inégalité compensant de la part de la nation qui opprime, de la grande nation, l’inégalité qui se manifeste pratiquement dans la vie. Quiconque n’a pas compris cela n’a pas compris non plus ce qu’est l’attitude vraiment prolétarienne à l’égard de la question nationale : celui-là s’en tient, au fond, au point de vue petit-bourgeois et, par suite, ne peut que glisser à chaque instant vers les positions de la bourgeoisie. [...]
“[...] Autre chose est de nous engager nous-mêmes, fût-ce pour les questions de détail, dans des rapports impérialistes à l’égard des nationalités opprimées, en éveillant ainsi la suspicion sur la sincérité de nos principes, sur notre justification de principe de la lutte contre l’impérialisme. Or, la journée de demain, dans l’histoire mondiale, sera justement celle du réveil définitif des peuples opprimés par l’impérialisme et du commencement d’une longue et âpre bataille pour leur affranchissement. ” (V. Lénine ; La question des Nationalités ou de l’Autonomie, 31-XII-1922.)
L’impérialisme, au
sens léniniste, n’est peut-être pas le stade suprême du capitalisme; mais
l’impérialisme, au sens strict, est sûrement le degré extrême du
Nationalisme : le Nationalisme impérialiste. Nationalisme et totalitarisme
en général sont conceptuellement et sociologiquement inséparables.
L’inter-nation,
l’internationalisme, suppose la nation : il ne peut y avoir d’internationalisme
sans nations, niant les nations et leurs droits; qui est la position
fondamentale du Nationalisme impérialiste. Tout ‘anti-nationalisme’ est
corrélativement nationaliste. On ne peut pas nier une nation ou un nationalisme
sans affirmer et lui opposer une autre nation et un autre nationalisme. De
cette façon, en condamnant ‘le nationalisme’, ce que les Nationalistes français
et les Nationalistes espagnols condamnent, en réalité, est en fait le
nationalisme défensif des nations opprimées, qui est un obstacle au
Nationalisme impérialiste d’eux-mêmes. Le Nationalisme français (et
l’espagnol), puisqu’il postule sa propre Nation modèle dont le rôle est de
reconstruire le monde à son image par son imposition aux autres, est
incompatible avec tout internationalisme.
Selon Engels:
“Ces gens exigent maintenant, parce que les victoires allemandes leur ont fait cadeau d’une république (et quelle république!), que les Allemands quittent immédiatement le sol sacré de la France, sinon: guerre à outrance. Ils continuent à s’imaginer comme autrefois que la France est supérieure, que son sol a été sanctifié de par 1793 et qu’aucune des ignominies accomplies depuis par la France ne saurait le profaner, et que le mot creux de République est sacré.” “Le peu d’internationalisme républicain de 1830-48 se groupa autour de la France, qui devait libérer l’Europe, et intensifiât le chauvinisme français à ce point que la vocation de la France a libérer le monde et son droit d’ainesse à occuper la première place nous rends la vie impossible tous les jours”. (D’une lettre d’Engels à Marx; Londres, 7-Septembre-1870.)
“Arrive l'année
1866. Marx écrit à Engels au sujet de la ‘clique proudhonienne’ de Paris qui
‘traite la nationalité de non-sens et s'en prend à Bismarck et à Garibaldi. En
tant qu'argument polémique dirigé contre le chauvinisme, cette tactique est
utile et peut s'expliquer. Mais lorsque les adeptes de Proudhon (auxquels
appartiennent également mes bons amis d'ici, Lafargue et Longuet) pensent que
toute l'Europe peut et doit rester tranquillement et paisiblement assise sur
son postérieur en attendant que ces messieurs de France abolissent la misère et
l'ignorance... ils sont ridicules.” (Lettre du 7 juin 1866).
“‘Hier’, écrit Marx le 20 juin 1866, ‘il y a eu discussion au Conseil de l’Internationale sur la guerre en cours. [...] Les débats, comme il fallait s’y attendre, se sont concentrés sur la question des ‘nationalités’ et de notre attitude à son égard. Les représentants de la ‘jeune France’ (qui n’étaient pas des ouvriers) défendirent le point de vue suivant lequel toute nationalité et la nation elle-même sont des préjugés surannés. Du stirnérisme proudhonien. [...] Le monde entier doit attendre que les Français soient mûrs pour accomplir la révolution sociale. [...] Les Anglais ont bien ri lorsque j’ai commencé mon discours en disant que notre ami Lafargue et les autres abolisseurs des nationalités s’adressent à nous en français, c’est-à-dire en une langue incompréhensible aux neuf dixièmes de l’assemblée. Ensuite j’ai donné à entendre, que sans s’en rendre compte lui-même, Lafargue semble comprendre, par négation des nationalités, leur absorption par la nation française, considérée comme un modèle’.” (V. Lénine ; ‘Du droit des Nations à disposer d’elles-mêmes’, 1914.)
Ainsi, les
Nationalistes français, comme les Nationalistes espagnols, rejettent en théorie
et en pratique le droit de libre disposition, autodétermination ou indépendance
des Peuples. Or, sans droits humains, pas de démocratie. Il n’y a pas de
démocratie, mais impérialisme et fascisme, là où on nie le droit
d’autodétermination des Peuples : premier des droits humains fondamentaux
et condition préalable de tous.
Cependant, pour les
monopoles impérialistes franco-espagnols de propagande c’est “le nationalisme
basque” : “la peste de la bourgeoisie basque”, qui menace la liberté, la démocratie
et la paix mondiale. Selon eux, la bourgeoisie française étant depuis toujours
immunisée contre ce type de maladie, le Nationalisme français ça n’existe pas.
(Il y aurait, par contre, une bourgeoisie basque “nationaliste” ; un fait
surprenant dans un pays où les élites et le peuple : ayant renié leur
identité selon les idéologues de l’impérialisme, se seraient librement ralliés
depuis des siècles au Nationalisme français et espagnol.)
Une société unique
mondiale aurait le même contenu objectif que dans une société multinationale
caractérise une nation, même si le mot et le concept de celle-ci n’existeraient
pas ou n’existeraient plus, faute de diversité corrélative constitutive, comme
les qualités objectives de la matière seraient les mêmes si, en absence de
diversité, les concepts et les mots différenciés y afférant disparaissaient.
Une société humaine dépourvue de tels caractères ça n’existe pas et ne peut pas
exister, pas plus qu’un corps sans dimensions. Bien entendu, l’idéologie
impérialiste n’a jamais reculé devant les hypostases et autres paralogismes
dont elle pouvait tirer profit pour tromper les peuples et les incorporer à la
nation modèle, universelle et non-nationaliste. [...]
Le cosmopolitisme, le mondialisme sont une forme de Nationalisme, ou une forme de multi-nationalisme. Les supporters du “dépassement a-national” sont, en réalité, des nationalistes qui essayent de masquer leur nationalisme aux dépens d’autres. Les nationalistes français le proclament sans cesse, “le français est cartésien”.
V
“Il n’y a pas de
nationalistes durs ou modérés, il n’y a que des nationalistes et c’est tout, et
il faut les isoler”, c’est actuellement un mot d’ordre des Nationalistes
françaises et espagnoles à l’encontre de tout
indice de résistance à l’impérialisme. Le nouvel appel de la “gauche”
nationaliste est, quand-même, une petite nouveauté: telle qu'il est, ses
formulations apportent un progrès appréciable, une innovation considérable –
qu'on se fait un plaisir de souligner – et un soulagement certain pour un
avenir rassurant. La mission historique des Partis Nationalistes “de gauche”,
au Pays Basque et ailleurs, étant toujours consisté à fausser le jeu et
brouiller les cartes; à confondre, dévoyer, détourner, récupérer, exploiter,
corrompre, pénétrer, diviser et, finalement, ruiner la résistance démocratique
des mouvements de libération des Peuples, le fait de pouvoir s’en passer d’eux
par sa propre décision sera sans aucun doute un grand et agréable progrès.
Au moment de la
guerre impérialiste de 1936, la “collusion des rouges et des
séparatistes” : tant de fois décriée et condamnée par la propagande de
La victoire du
Général Franco ainsi assurée, tous les Résistants basques se souviennent des
temps fort prolongés où l’on ne pouvait marcher dans la rue – ni même rester à
la maison – sans avoir affaire aux commandos, travestis, sangsues et pots de
colle du Nationalisme espagnol et français “de gauche” : tous débordants
de compréhension, de sympathie et d’alléchantes promesses pour le Pays Basque,
dont la liberté “avait comme préalable la chute de Franco, la démocratie ou la
révolution socialiste en Espagne et en France”. La liberté des Peuples :
fondement de la Démocratie, était toujours “reconnue” comme accessoire,
éventuelle et différée.
En réalité, la
prétendue “lutte prioritaire contre Franco, pour la démocratie et pour le
socialisme” des social-impérialistes espagnols and français cachait mal le
refus du droit de libre disposition, autodétermination or indépendance des
Peuples, et visait à récupérer et à détruire leur lutte pour la liberté
nationale. Le maintien, à tout prix, des annexions au profit des Etats impérialistes
était le fondement inamovible de tout projet politique “démocratique”; avec,
pour conséquence, le sabordage de la lutte contre le Franquisme et pour la
Démocratie, au profit de la “réconciliation nationale” et de la continuité de
l’acquis politique fasciste. On sait ce qu’il en est advenu, à ce jeu, de la
“révolution démocratique, socialiste ou communiste”. (La “gauche” nationaliste
française est, désormais, libérée. Elle peut, ouvertement, s’allier aux
Nationalistes français et espagnols de droite et “de gauche” contre le vrai
ennemi : les Basques.)
Il y en a eu,
pourtant, des naïfs pour s’y laisser prendre, des malins pour collaborer, et
des renégats pour se vendre : au niveau individuel, bureaucratique ou
corporatif. Cela fait soixante ans que le Pnv n’a d’autre ligne politique ou
idéologique que celle que le PsoE et le parti franquiste traditionnel lui
marquent. De même, cela fait autant que son corollaire, l’Eta, a été souvent
investi en toute impunité par les agents individuels et collectifs des partis
nationalistes espagnols et français. Les “compagnons de route” ainsi désignés
ont rempli la mission qui leur était impartie, au profit du “front démocratique
de gauche” avec l’impérialisme et autres lubies réactionnaires de même acabit.
Dans ces circonstances, les pièges “dualistes”
sur “la démocratie, le socialisme et la question nationale” : de plein gré
acceptés, avalés et répercutés par le groupe liquidationniste Pnv-Eta, ont
fabriqué des collaborateurs, des déserteurs et des transfuges à la chaîne, et
causé des dégâts difficiles à surestimer.
Or, depuis quarante
ans cette tactique a perdu de son efficacité. Les résultats de la “transition”
intra-totalitaire espagnole ne sont que trop évidents. Nationalistes espagnols
et français ont pu enfin se laisser aller à leurs penchants et affinités
naturels contre la liberté des Peuples et, en particulier, du Peuple Basque. Le
Nationalisme du PsF a atteint des sommets trop manifestes. L’ancien PsoE n’est
plus que la mouture de la Falange Espagnole, qui avait investi ses dépouilles
dans les années soixante. Des accords internationaux entre partis et
gouvernements National-socialistes (à Paris, à Madrid ou à Latché) ont ouvert
les yeux de beaucoup, et des suites sans ambiguïté ont réduit, sinon anéanti,
la marge de manœuvre. Quant au PcF, ce n’est plus qu’un résidu informe qui
essaie désespérément de se renflouer en arrachant la clientèle de l’extrême
droite officielle, au moyen d’une surenchère Nationaliste sans précédent.
Des “naïfs” qui
trente ans auparavant se félicitaient de “l’arrivée de la gauche au pouvoir en
Espagne et en France” : une arrivée “qui ouvrait des nouvelles
perspectives de liberté pour le Peuple Basque”, ont été incapables d’expliquer
ou de dissimuler la réalité. Ils sont devenus (relativement) rétifs à la
séduction Nationaliste “de la gauche” espagnole et française, ou sont passés
ouvertement du côté de l’impérialisme. Tous ceux qui – par ignorance, naïveté
ou mauvaise foi – ont participé à ces manœuvres sont ainsi confrontés à des
textes et des attitudes qu’ils ne pourront pas facilement tergiverser.
Il faut bien le
remarquer, pour ne pas se tromper sur les suites prévisibles: si les
“alliances” avec l’impérialisme semblent traverser maintenant un moment
difficile, ce n’est pas comme résultat d’une quelconque autocritique ou
altération “révisionniste” des groupes aux étiquettes basques qui s’y sont
engagés, mais comme conséquence de l’initiative, du renforcement et de
l’agressivité des organes d’occupation et du Parti nationaliste français, tous
désormais convaincus que, avec des incapables et des minables de cette espèce,
tout rapport autre que la répression pure et dure est aussi inutile que
préjudiciable. C’est bien d’ailleurs l’opinion, souvent plus poussée encore,
aujourd’hui généralisée de par le monde.
Il suffit,
cependant, d’entendre les lamentations des laissés pour compte sur “les
trahisons incompréhensibles et les accords contre nature”; il suffit d’observer
leurs attentes et sollicitations, pour qu’aucun doute ne soit permis sur leur
volonté de poursuivre ou de revenir sur la même voie, pour peu que leurs chers
maîtres leur en laissent encore la possibilité.
Il faut remarquer aussi que l’unité de la Nation Basque et de son problème est telle que les transfuges n’adhèrent pas au Nationalisme français ou espagnol, mais ils deviennent des partisans ardents des deux à la fois.
VI
“Je suis
anti-nationaliste, de la même façon que d’autres sont anti-capitalistes”, dit
Espilondo. Ce socialiste n’est pas anti-capitaliste comme d’autres le sont.
Qu’est-ce qu’il est donc Espilondo? Il ne peut quand même pas se dire
pro-capitaliste ou social-capitaliste: ça ne ferait pas assez “socialiste” ou
assez “communiste”. Mais il ne peut pas se dire anti-capitaliste comme
d’autres, fous rires assurés. Espilondo opte pour se dire
“non-anticapitaliste” : deux négations qui valent pour une affirmation
dans “le langage simple de la vérité et dans la clarté, toujours dans la
clarté”. Tant de clarté c’est aveuglant.
National-socialistes
et National-communistes (le groupe PsF-PcF) se dissent “non-nationalistes,
anti-nationalistes, anti-terroristes, non-violents, non-anticapitalistes”. Mais
quel est, en positif, son contenu politique? En fait cette inflation
négativiste, ce déluge d’adversatives, ces fuites et ces refus formalistes ne
sont pas innocents ou dépourvus de signification. Ils traduisent le malaise et
l’incapacité des Nationalistes à se définir; leur refus de se présenter en
public tels qu'ils sont vraiment. Les Nationalistes se cacheront donc sous des
formules négatives et périphrastiques. Ils seront monistes, “non-istes”. Ils ne peuvent
pas s’avouer National-impérialistes et social-chauvins, ils seront
“anti-nationalistes et non-nationalistes”. Mais c'est quoi des
anti-nationalistes et non-nationalistes partisans, agents et bénéficiaires du
Nationalisme impérialiste français? Ils se disent “non-violents et
anti-terroristes”. Mais c'est quoi la non-violence et l’anti-terrorisme des
partisans, détenteurs, agents et bénéficiaires du monopole de la violence et du
Terrorisme d'Etat? Ils nous font exploser de rire.
La République
française est fondée sur le – mal – acquis de l’Ancien Régime, dont le fondement
et la structure ont néanmoins été conservées et développées à la “Révolution”.
Le Terrorisme de masse, les crimes de guerre, les crimes contre la paix, les
crimes contre l’humanité qui ont horrifié le monde ont fondé la Dictature
républicaine: premier essai de régime totalitaire moderne et modèle pour tous
les autres. Au nom du progrès (et c’est là où se trouve sa plus grande
originalité : inspiratrice de toute l'idéologie totalitaire contemporaine), la République française inaugura la Dictature et le Terrorisme travestis de
liberté, droits humains et démocratie; le Nationalisme impérialiste français,
sous couvert et falsification d’universalisme, égalité et libre disposition des
Peuples; le bellicisme, l’agression et le pillage, sous rhétorique de
fraternité et pacifisme; le fanatisme idéologique, sous prétexte de science et
de lumières ou de religion républicaine; la déification de l’Etat, sous
prétexte de laïcité et de morale civique; et le colonialisme, déguisé en
civilisation et progrès humanitaires.
La “Révolution” a
liquidé : par la violence criminelle et au mépris de tous les droits
fondamentaux, ce qui restait des libertés historiques du Peuple Basque.
En matière de
Nationalisme impérialiste, les Nationalistes français “de gauche” n’ont cédé en
rien aux Nationalistes français “de droite”. C'est sous une idéologie et des
étiquettes “socialistes” et “de gauche” que les partis français ont relancé,
servie, menée, financée l'entreprise de expansion, domination, pillage,
répression et terrorisme de
C’est le “socialiste
alsacien” Ngaelen qui “fit de la fraude électorale une institution d’Etat”. Le
gouvernement “de gauche” de Mendès-France dirigeait le “balayage” terroriste
préconisé et ordonné par le ministre “de gauche” Mitterrand (“balayez-moi tout ça!”) contre la lutte
de libération nationale du Peuple Algérien et, très conséquemment, profitait du
pouvoir pour inaugurer la politique de collaboration ouverte avec le General
Franco contre la Résistance basque en supprimant (1954) Radio Euzkadi. C’était
un modeste prélude à la concertation du gouvernement National-socialiste français
avec les fascistes espagnols pour l'intensification et l'extension du
Terrorisme d’État au Pays Basque. Rien de plus “socialiste et communiste”, rien
de plus républicain que la féroce répression nationaliste et coloniale du
gouvernement “socialiste” présidé par le “socialiste” Mollet et mise au point
par le gauleiter-résident général “socialiste” Lacoste (1956-58) contre la
population résistante de l’Algérie.
Les pleins pouvoirs
à l'armée française d'occupation coloniale en Algérie ont été sollicités et
votés par les National-socialistes et les National-communistes français, ce qui
a porté aux sommets le Terrorisme, la torture, les représailles racistes contre
des hommes, des femmes et des enfants sans défense. (Il y a eu, parait-il, des
“communistes” français “qui en ont pleuré”; mais c'est en Algérie même que les
populations indigènes ont eu à subir et à pleurer les conséquences du racisme
terroriste, nationaliste, “socialiste et communiste” français.) Et il ne s’agit
pas de quelque chose de nouveau : c’est le génocide républicain en Vendée que
les bolcheviks ont pris pour modèle insurpassée de l’assassinat de masse de la
paysannerie russe.
C'est le “communiste
géorgien” Ordjonikidzé qui a écrasé les républiques caucasiennes, et le
“communiste ukrainien”·Khrouchtchev qui a écrasé l'Ukraine, sous le “communiste
géorgien” Staline; tout comme le “communiste” kageviste russe Poutine déporte,
massacre et terrorise la Tchétchénie et ses voisines, avec la bénédiction et la
complicité déclarée de la nouvelle Puissance hégémonique mondiale et autres
“démocraties” occidentales.
Mussolini et Hitler
aussi se disaient “socialistes” (ils ne l’étaient pas moins que beaucoup
d’autres qui s’en vantent), et c'est de cette façon qu'ils ont séduit les
masses travailleuses nationalistes pour arriver au pouvoir et mettre en place
le Nazisme espagnol : toujours protégé et préservé depuis par la
continuité institutionnelle germanique, dont les raids terroristes écrasèrent
sous les bombes Durango et Gernika. Ce sont le président Mitterrand et ses
ministres National-socialistes qui ont scellée la coopération inconditionnelle
des républicains français avec les
monarchistes-franquistes-falangistes-socialistes espagnols; qui ont poussé,
renforcée et développée la stratégie répressive plus loin que leurs complices
et prédécesseurs de la “droite” officielle ne l’avaient jamais portée. C’est
eux qui ont voulu le pacte au sommet de Latché et la vague d’assassinats
terroristes qui a déferlé sur la Côte Basque en conséquence. C’est avec des
Nationalistes et fascistes espagnols héritiers de Franco que les
National-socialistes français ce sont acoquinés pour organiser la répression
contre la liberté des Peuples. On a tous remarqué les gestes secs et tranchants
du ci-devant “trotskyste” Jospin devant la télévision espagnole, à l’adresse de
son voisin le ministre franquiste de l’intérieur espagnol, pour approuver et
stimuler la politique de répression et Terrorisme d’État au Pays Basque, et
désavouer toute (imaginaire) velléité d’apaisement. Ç’est par les mêmes moyens
que les Nationalistes réunis, de tout bord, ont consolidé le colonialisme dans
les territoires “français” des antipodes.
La corruption et les
affaires, qui sont partout, sont cependant la spécialité “naturelle” de la
“gauche” nationaliste. Le National-socialisme français se fonde sur “les
valeurs de la République”, mais
Les
National-écologistes français ont aussi voté pour le dernier pollueur atomique
du Pacifique, sacrifiant héroïquement la nature et les hommes au profit de la
“dissuasion” nucléaire. Il n’y a pas eu erreur dans ces décisions. On ne
saurait voir là une ombre d’alliance contre nature. Ils se disent de gauche,
mais ils votent tout naturellement pour la “droite” et s’allient aux
franquistes espagnols. Comme Jaurès ne le disait pas, ils ne sont que des Nationalistes et des Fascistes, et c’est tout.
Ce ne sont pas là de
menus larcins, de petits méfaits ou de délits mineurs. Ce sont des crimes de
droit commun : crimes de guerre, crimes contre la paix et crimes contre
l’humanité dont la répression est le fondement même du droit international. Si
les titulaires d’un tel palmarès pouvaient être capables d’un sentiment de
décence, quand on parle de liberté et de dignité, de démocratie, de droits
humains et de Nationalisme, ils ne pourraient que fermer la bouche sauf pour
avouer leurs crimes et assumer leurs responsabilités. Mais l’infamie politique
s’accompagne ici du manque de vergogne le plus complet. Persuadés qu’ils sont
que rien ne peut désormais faire obstacle à leur domination; que le règne de
l'imbécilité collective est pleinement établi par leurs soins, c'est sont ces
gens-là qui maintenant traitent de nationalistes, de fascistes et de
terroristes les victimes de leurs forfaits. Nous devons rester vigilants devant
eux ; d'autant plus que leurs auteurs les ont toujours dissimulés derrière
une caricature de liberté et de démocratie. L'identification totale de “ces
gens-là” avec les fascistes espagnols et la nouvelle réaction internationale
les rend encore plus dangereux, si cela est possible.
Quand on parle de
Nationalisme, de Violence, de Terrorisme et de Fascisme, il n’y a pas de
Nationalistes français de droite ou de gauche, de patriotes et d’antipatriotes,
de civils et d’ecclésiastiques, de violents et de pacifiques, de militaristes
et d’antimilitaristes, de conservateurs bourgeois et de révolutionnaires
ouvriers. Il n'y a qu'un Parti Nationaliste français, il n’y a que des
Nationalistes, ayant tous adopté les valeurs et les buts du fondamentalisme chauvin,
héritier du prototype totalitaire absolutiste.
L’idée française constructiviste-absolutiste de “la Nation, l’identité nationale et l’Etat” étant ce qu’elle est, il n’y a pas pour les Peuples annexés autre issue que leur liquidation. Peut-être les espagnols essayent de tromper leur monde avec leur “pluralisme” et d’autres conneries, pas les français.
VII
Au sein du PsF on
n'a pas de difficulté à faire l’amalgame entre “nationalistes basques” et
hitlériens. En considérant la participation de quelques groupements aux sigles
basques aux “élections démocratiques” françaises, Espilondo pense à Hitler, qui
serait “arrivé au pouvoir par la voie démocratique”: lieu commun aussi
équivoque qu'apologétique.
On l’a déjà vu, pour
le PcF “Le nationalisme est un danger. Les nationalistes, ici comme ailleurs en
Europe et dans le monde, visent à faire de l’autre un étranger, un ennemi. Il y
aurait les ‘purs’ qui adoptent le projet indépendantiste, et les autres (y compris
basques) qui sont voués à être des cibles. C’est en cela que le nationalisme
est dangereux qu’il s’apparente au fascisme. Les indépendantistes ne sont pas
de gauche, ils sont de droite extrême”.
Les fascistes
espagnols, héritiers du despotisme oriental, des dictatures militaires et du
franquisme, disciples, alliés et créatures de Hitler et de Mussolini, devenus
entretemps modèles de démocratie pour le PsF, le PcF et la nouvelle Europe, ne
se gênent pas désormais pour qualifier de nazis les démocrates basques écrasés
sous les bombes de l'Axe au service du terrorisme impérialiste; ce qui – soit
dit en passant – avait arrivé avant même que National-socialistes allemands et
National-communistes français “purs” avaient concerté des alliances pas
douteuses, sur le dos des autres (y compris basques) qui étaient voués à être
rayés de la carte.
De la part du PcF la
curieuse expression “le nationalisme s'apparente au fascisme” ne concerne pas,
bien entendu, le Nationalisme français mais le mouvement démocratique basque
contre l’impérialisme. Ainsi compris, cette “parenté” est l'indice d'une
restriction, une retenue et une modération surprenantes de la part du PcF.
Comme si un reste de pudeur, de gêne, une ombre de sens de l'honneur qu'on ne
leur soupçonnait pas empêchait encore ces supports des guerres, du Terrorisme
et des répressions coloniales du Nationalisme français de suivre jusqu'au bout
la propagande de ses alliés franquistes. On veut espérer que ces inerties, ces
réticences et ces parentés équivoques seront vite dépassées au profit de la
fermeté et la clarté qui sont l'exigence déclarée de l'union sacrée
nationaliste. (C'est peut-être là un moment de faiblesse, indigne des
antécédents du PcF.)
Selon Baguez “le
Parti communiste français tient à réaffirmer son opposition farouche à toute
forme de violence et de terrorisme. Il rappelle que les origines de cette
violence sont extérieures à notre pays et que les solutions ne peuvent être que
politiques”. On croit rêver: si le PcF est contraire à toute forme de violence
et de terrorisme, alors – puis qu’il l’a trahi toute l’histoire – l’idéologie
et la politique du PcF ce sont des renégats ou des imposteurs vendus à la
bourgeoisie fasciste, nationaliste et impérialiste française et espagnole. Ou
bien: le pays du PcF c’est
C'est question
récurrente parmi sociologues, politologues et idéologues que celle des
différences entre communisme et fascisme. Ce n'est pas ici le lieu pour en
traiter. Par contre, en ce qui concerne non pas ce problème en général mais les
différences entre le National-communisme français et le fascisme, la question
est depuis longtemps entendue: il n'y en a aucune. Leur rapport n'est pas de
parenté mais de simple identité. Bien sûr le PcF “se” situe à gauche du FN;
mais sa théorie et sa pratique nationalistes, ses attitudes sur la banlieue,
sur l’union européenne et sur l’impérialisme en général, le situent à droite de
l’extrême droite nationaliste et fasciste officielle. Rien de nouveau
là-dessus, bien entendu: les “communistes d’Anglet” ne sont pas différents des
“communistes” de Sidi-Bel-Abbès, qui s’étaient déjà illustrés – au sein et dès
les débuts de
“Les basques sont des fascistes”, avait déjà proclamé à la télévision française Cohn Bendit, le plus notoire représentant et député européen “gauchiste-révolutionnaire” du mouvement “écologiste”.
VIII
“Dès lors, nous dénonçons les alliances douteuses entre les nationalistes et les maires de droite. Avec Camblong c'est pire qu'avec la droite.” Le PsF et le PcF condamnent désormais les “alliances électorales douteuses et les compromissions électoralistes” entre la “droite” – Nationaliste – française, et les “nationalistes” (basques) ; des alliances et des compromissions qui pourraient remplacer les compromissions et les alliances – non douteuses – faites au profit de la “gauche” non moins Nationaliste française. Des compromissions et des alliances condamnées à leur tour, comme il se doit et dans l’inversion des termes, par la “droite” nationaliste française.
Il faut noter que, dans tous ces
accouplements pervers, divers et complémentaires, c’est le “nationalisme”
basque qui est l'élément maudit et condamné, dont l’alliance est
alternativement déshonorante pour les composants du Parti français, et non le
contraire.
Ces reproches et ces
hommages de la “gauche” Nationaliste à sa “droite” (mais néanmoins française),
et de la “droite” Nationaliste à sa “gauche” (mais non moins française),
montrent une fois de plus que la vraie alliance, ou plus exactement
l’identification: non seulement formelle et électorale mais permanente,
fondamentale et stratégique, est celle de la “gauche” Nationaliste française
avec sa “droite” Nationaliste; c'est celle de l’Union Sacrée Nationaliste-Impérialiste qui existe entre la bourgeoisie Nationaliste et son Etat
militariste et prédateur, et la “gauche” social-impérialiste française, contre la liberté des Peuples et la démocratie en
général. C’est aussi l’alliance – dont le Nationalisme français ne peut se passer – avec l’Etat et les forces Franquistes au pouvoir.
L’histoire montre et
remontre que la démocratie a toujours été subordonnée par le Nationalisme
français de “gauche” au
Quant au “socialisme républicain”, comme le disait Guesde à Jaurès,
“votre erreur est dans votre conception du socialisme que n’a rien de
socialiste: vous faites sortir votre socialisme de
Ce n’est pas
“l’extrême droite” officielle l’ennemi prioritaire de la “gauche” nationaliste,
c’est un allié toujours possible contre le vrai ennemi prioritaire, le seul que
la “gauche” nationaliste ne supporte pas: la résistance des Peuples opprimés
contre le nationalisme impérialiste français. Ce n’est pas le FN qui a apporté
l’extrémisme, l’intolérance et, avant tout, le Nationalisme et le pouvoir bureaucratique-administratif-militaire
dans la politique française. Ils y sont bien mieux établis que partout
ailleurs, à l’exception du modèle espagnol.
“Si vous voulez
absolument sur le plan national que tous les pouvoirs de décision soient
concentrés dans les mains du parti unique de Chirac: alors confiez votre avenir
et celui de tous vos proches pendant 5 longues années dans les seules mains de
Chirac et de son parti unique. Dimanche 16 Juin vous avez l’occasion de rompre
avec cette logique antisociale et antidémocratique en votant: Espilondo.”
Quelques jours plus tard: “Le premier tour de l’élection présidentielle nous a
plongées dans l’inquiétude. Vous êtes sans doute nombreux à avoir été comme moi
surpris et atterrés par la menace d’extrémisme et d’intolérance qu’il faisait
planer.” Conclusion logique (et pratique): “Concentrer les votes pour la
droite”.
National-socialistes
et National-communistes (comme “certains nationalistes basques”) ont donc voté
et fait voter pour Chirac, confiant leur avenir et celui de tous leurs proches
pendant 5 longues années dans les seules mains de Chirac et de son parti
unique. Les alibis électoralistes et opportunistes ont par-là montré qu’ils
n’ont pas d’alternative politique à la droite traditionnelle. La “gauche” qui
appuie Chirac “pour contrer Le Pen” (= appuyer le danger réel contre la menace
imaginaire) a donné à la droite officielle une base de 82%: bien plus grande
qu’elle n’aurait eue d’elle-même; elle a fait tomber les électeurs dans le
piège concerté de la réaction institutionnelle, et cela pour bien plus que cinq
longues années.
Les Nationalistes français se disant de gauche viennent de voter pour la droite officielle qui, grâce à eux, disposera d’une majorité écrasante pour opprimer les Peuples. Le résultat d’actualité est que les partis “démocratiques” vont pouvoir faire la politique que le FN n’est pas en mesure de faire tout seul, mais que la droite officielle va imposer avec le blanc-seing des partis dits de gauche et un soutien “populaire” dix fois plus important. Il n’y a pas lieu de s’étonner de l'union électorale “contre nature” de la majorité sortante et de la droite officielle: elle est toute naturelle. “Pour sauver la démocratie et la République”, les Nationalistes socialo-communistes ont voté pour rétablir le président affaibli, usé, décrié, discrédité et compromis des essais nucléaires et des affaires en tous genres; et – inévitablement, sous promesse de fiers et intraitables rétablissements aux législatives – ont donné la majorité absolue et son soutien parlementaire à la droite présidentielle. (Par la suite, ils ont continué à dénoncer “la menace Le Pen” pour apporter la réalité Sarkozy: un arriviste ambitieux et prétentieux comme ses prédécesseurs et succeseurs, sans plus de mission ou de capacité que d’exploiter pleinement les ressources de la violence que le Nationalisme totalitaire met à sa disposition.) Ils se diront de gauche mais ils ne sont que des Nationalistes de droite, et c'est tout.
Bien entendu, la
“gauche” nationaliste ne s’est pas “alliée” à la “droite” officielle,
puisqu’une alliance est un rapport entre entités politiques. Elle s’est
incorporé, confondu, disparu dans ce sein nationaliste d’ont elle est née. Si
“se couper en deux est le plus grand plaisir pour une cellule”, réunion,
assimilation, confusion et entropie son la passion totalitaire des
Nationalistes français.
Le FN est résultat
et produit de la politique Nationaliste-totalitaire de la droite et la “gauche”
officielles. Ce n’est pas la “montée” du FN qui fait reculer la “gauche”
française; c’est l’inexistence de la gauche française qui permet la “montée” du
FN. Le FN ne sort pas de la “droite” classique, pas plus que le Fascisme
italien et le National-socialisme allemand ; bien au contraire, ils ont
tous invoqué dans leurs origines le populisme National-syndicaliste “de
gauche”.
L’extrémisme et
l’intolérance, dont la menace soi-disant inquiète, surprend et atterre le
député Nationaliste, sont bien plus qu’une menace et bien plus anciens que la
“montée” électorale du FN. Il n’est d’ailleurs pas besoin d’une exceptionnelle
pénétration pour remarquer que le FN est en même temps une tendance
complémentaire et auxiliaire, un chausse-pied, un révélateur, un épouvantail,
un moyen de pression, un facteur de conditionnement de l’opinion nationaliste,
un fournisseur d’idées, un alibi et une référence permettant de placer,
déplacer ou replacer la droite nationaliste réelle “au centre et à gauche” de
l’échiquier politique conventionnel. Comment le RPR, le PsF ou le PcF
pourraient être à droite ou à extrême droite puisque le FN s’y trouve déjà? Le
FN est le moyen de camoufler la droite réelle et le Nationalisme français en
général. C’est aussi pour ça qu’on l’a inventé.
La politique de la
“gauche” nationaliste fait recours à la peur du pire comme moyen de
mobilisation des masses populaires ; mais la peur du pire n’ouvre pas la voie
aux forces démocratiques, elle l’ouvre à la réaction fasciste et National-socialiste,
comme tant d’exemples historiques l’ont montré et démontré. Le régime franquiste (que
la “gauche” nationaliste française a pour allié et modèle), ayant pris le
pouvoir depuis depuis quatre-vingts ans et pour le garder à l’avenir, n’a plus besoin de monter un nouvel Halloween fasciste pour les Espagnols : si le fascisme qu’ils ont déjà – et n’ont jamais cessé d’avoir – ne leur fait plus peur, on voit mal de quelle “droite extrême” auraient-ils peur désormais.
Trouver des
prétextes débiles “de gauche pour défendre la démocratie”, en faisant la
politique de l’extrême droite, c’est la fonction réelle du National-socialisme
petit bourgeois français. Ils viennent de montrer une fois de plus que la
“gauche” nationaliste française n’est qu’un appendice de la droite officielle
impérialiste, pour tromper les Peuples. Entre Fn, Rpr, PsF et PcF il n’y a pas
de divergences de fond. Il y a des fonctions complémentaires ou tactiques, des
différences formelles, et des intérêts divers concernant l’accès à l’assiette
au beurre. La droite officielle fait ce que l’extrême droite officielle ne peut
pas faire d’elle même, et la gauche officielle fait ce que la droite officielle
ne peut pas faire d’elle même.
Quand on fait une
politique de droite, il n’y a pas lieu de se surprendre si les électeurs s’en
aperçoivent de temps en temps ; et si – s’en étant aperçus – ils préfèrent les valeurs
sûres et sans fard de la droite et l’extrême droite officielles, aux travestis
de la droite nationaliste “de gauche”. Ils peuvent toujours espérer qu’une
nouvelle fois la droite officielle aura besoin de la “gauche” officielle pour
faire passer les essais atomiques, les mesures “sociales” ou la répression
coloniale, l’alternance convenant mieux que la cohabitation à un heureux et
satisfaisant partage des responsabilités. Les manœuvres électorales de la
droite réelle ont donné le résultat réel pour lequel ont été échafaudées. Bien
joué, vieille salope.
Si les forces
démocratiques sont réelles elles se manifestent avec son stratégie propre, dans
toute l’étendue de la lutte des masses populaires. Elles ne sont pas à la merci
des péripéties, électorales ou autres. Si une force stratégique de gauche
existait, ces prétextes “tactiques” n’auraient pour elle aucun sens. L’ignorer
n’est pas une erreur, ce n’est même pas un aveu d’impuissance: c’est un aveu
d’inexistence dont les auteurs – mauvaise foi aidant – ne se rendent peut-être
pas tout à fait compte. De débâcles présidentielles en déroutes parlementaires,
ce sont parcours et péripéties annoncés d’une dérive obligée.
Des bandes
“réalistes-opportunistes-possibilistes-minimalistes-radicales et modérés”, qui
arborent des signes basques d’identité, viennent de se fondre et se confondre
une fois de plus avec les Nationalistes français “pour sauver les valeurs
démocratiques et faire reculer le nationalisme et le fascisme”, en confortant
le pouvoir en place: c’est le pouvoir qui, avec leur appui et caution, va
s’abattre sans frein ni mesure sur le Pays Basque qu’ils disent représenter. La
“gauche” française et ses ralliés départementalistes ont en commun d’être des
fictions dont les agissements mettent en évidence l’inexistence. Leur seul sens
c’est la récupération et le dévoiement de la stratégie de libération des
Peuples.
L’ensemble
réaliste-possibiliste-minimaliste-opportuniste-électoraliste Pnv-Eta ha
découvert depuis longtemps le truc absolu pour “gagner des élections”, dont les
conditions politiques objectives et subjectives imposaient et annonçaient les
pitoyables résultats. Il suffit de présenter un programme français qui ne fera
pas peur aux Nationalistes français, qui sont l’électorat réel et qui voteront
pour nous dès qu’ils verront que nous sommes au fond aussi Nationalistes
français qu’eux-mêmes. Il suffit de fausser et départementaliser le droit
d’auto-détermination avec le fol espoir de le rendre acceptable au
National-chauvinisme dominant. Il suffit de jouer le parti français gagnant,
dont les candidats deviennent ainsi les “nôtres”. ‘Nahiz
ez düdan esküin bozkatzeko üsantxarik, ezkerreko binagre nahasi hori beno
nahiago nüke hor esküineko ardo sano bat’, écrit Davant. [“Même si je n’ai pas l’habitude de voter à la droite, mieux
que ce vinaigre brouillé de la gauche je préférerais un bon vin de droite.”]
Grace à cet
époustouflant tour de passe-passe, dont “les faits ont démontré l’efficacité”,
ceux qui ont voté pour le PsF “en obtenant” ainsi des députés du PsF et même
“un parlementaire européen et de plus une femme”, ils ont eu aussi le loisir de
voir leur représentante-présidente interrompre le course d’une intervention
parlementaire pour rappeler au coupable, à toute l’Assemblée et a l’Europe
toute entière, que “le Peuple Basque, ça n’existe pas”. Le même procédé leur a
permis maintenant voter, “pour sauver la démocratie dans le Pays Basque”, au
parti Nationaliste de Chirac, Debré, Toubon, Pasqua, Sarkozy y Cia: expression
réelle et actuelle du déni des droits des Peuples et des Peuples mêmes,
inconditionnellement appuyé par le national-socialisme français dans son
intégralité. Ils ont obtenu rien de moins qu’un président de
“Nous ne devons pas
oublier que Hitler arriva au pouvoir par la voie démocratique. Les
municipalités sont la base de la démocratie et des institutions républicaines.
Les nationalistes entrent dans les municipalités pour pervertir les fondements
de la démocratie française, pour mettre en doute l’unité de
Mais que des basques
s'abstiennent aux “élections” françaises ou qu'ils participent, cela “prouve”,
dans tous les cas, leur caractère “antidémocratique”. Ils mettent par là en
danger, ils risquent de pervertir et déstabiliser “les institutions
démocratiques de
“J’ai toujours fait
le choix de la fidélité aux valeurs démocratiques, du contact permanent avec le
terrain et du parler vraie. C’est aussi faire le choix d’une certaine éthique
politique. Dans la clarté, toujours dans la clarté. La vie politique doit être
claire. Je refuse le double langage. Nous condamnons l’alliance de la majorité
sortante et des nationalistes. Nous n’acceptons pas les compromissions
électoralistes et le double langage de certains. Lorsque je vois les candidats
RPR et UDF avec les nationalistes, j'y vois des alliances contre nature.
Lorsqu’elle s’est fourvoyée dans une alliance avec le PNV et les abertzales
[sic], la droite angloaye a mis entre parenthèse les principes républicains et
joué à l’apprenti sorcier. Vous êtes nombreux à vous en inquiéter.”
On comprend par
ailleurs l’inquiétude d’Espilondo devant les tactiques irrégulières, déloyales
et ignobles de ces électeurs indésirables qui ont l’impudence de voter les
candidats de la gauche et la droite françaises réunies, détournant à leur
profit sinon la lettre des lois du moins leur esprit Nationaliste et
républicain. Ce sont surtout son intégrité, “son choix et son sens de
l’éthique, du parler droit, vrai et clair” qui s’y trouvent choqués, froissés
et blessés. C’est “son refus du double langage”, et son attachement au discours
unique et monopoliste, nationaliste et fasciste qui nourrissent son
indignation.
Des gens qui votent
pour les candidats du RPR, du PsF et du PcF ont toujours été considérés comme
des Nationalistes français. Quelques d’entre eux, bien sûr, ils se disent
“nationalistes basques”, mais qui les croira? Faudra-il qu’ils se disent
nationalistes français pour qu’ils soient démasqués et dénoncés en tant que nationalistes
basques infiltrés dans le réseau républicain? Alors, à qui se fier? Espilondo
lui-même pourrait très bien être lui-même avoir été infiltré pour une opération
de (très) longue portée. Les exemples historiques ne manquent pas; quoique ils
se situent presque toujours du côté des provocations policières et des services
d’intelligence et d’espionnage et contrespionnage officiels, dont les agents en
sont souvent arrivés à ne pas savoir eux-mêmes de quel côté ils se trouvaient.
Normalement les classes opprimés n’en ont pas les moyens, et en général sont
“devenues” trop bêtes pour ça. Mais, faute de preuves et de critères fiables, faudrait-il
juger dans son âme et conscience? Ou faudra-t-il persister dans la chasse aux
sorcières, puisqu’il “vaut mieux bruler vifs cent innocents que laisser s’échapper
un seul coupable”?
Mais dans ce cas il
n'y a aucune raison de s'inquiéter, parce qu’Espilondo a la solution : “Je
voudrais bien voir si ces gens vont le 11 Novembre devant les pierres du
souvenir, s'ils se mettent au ‘garde-vous’ quand les trois couleurs du drapeau
français montent au mât, aux accords de
Heureusement pour la
démocratie “ces gens-là”, malgré leur honteuses et odieuses tricheries, leurs
manque de scrupules et les illusions que certains d'entre eux se faisent de
pouvoir utiliser à leur fins les “élections démocratiques” qui leur sont
imposées, n'ont pas réussi à mettre en défaut la perspicacité d'Espilondo, bien
trop malin pour ça. Il dispose pour démasquer les ignobles nationalistes
basques et défendre
Crucifix, eau bénite,
épingles, tenailles, brodequins, fer, feu et autres révélateurs éprouvés de
IX
“Je ne dénie pas à
ces gens le droit de penser différemment: je leur dénie le droit à la violence.
Celui qui prend une arme connaît les risques, qu'il les accepte et c'est tout,
et qu'il n'envoie pas les gens pleurer ou manifester”, écrit Espilondo. Le PcF
renchérit : “Les communistes condamnent avec vigueur le terrorisme, les
assassinats, le racket pratiqués par l'Eta. Les nationalistes refusent de
condamner les actes de l'Eta. Durant les sommets de Biarritz et de Nice, les
nationalistes basques se sont livrés à des violences inadmissibles, en particulier
en profanant le monument aux morts d'Anglet. Les communistes continueront avec
beaucoup d’autres à combattre le nationalisme, le terrorisme. Ils persisteront
à agir pour la paix”.
Les Nationalistes
français, tout comme les espagnols, condamnent “toute violence d’où qu’elle
vienne”. Mais, en condamnant “toute violence d’où qu’elle vienne”, les
National-impérialistes espagnols et français visent en réalité la “violence”
des autres, qui fait obstacle à leur violence à eux. Le “rejet de toute
violence” ainsi proclamé n'est autre chose que l'affirmation du monopole de la
violence pour le Nationalisme-impérialisme français et espagnol.
Faire le récit des
faits de violence accomplis par le Nationalisme espagnol et français à travers
le monde, ça serait tâche impossible. Et il ne s’agit pas là d’un passé simple
ou simple passé, mais de l’élément constituant des rapports politiques actuels.
L’empire français, ici et ailleurs, a été obtenu et conservé par la violence,
c’est-à-dire : par la violence criminelle. On ne peut pas la condamner
sans condamner l’Empire lui-même, qui en est le résultat. On ne peut pas garder
l’Empire sans assumer, reconnaitre, approuver et revendiquer le rapport
continué de violence criminelle qui en est le constituant. On ne peut d'ailleurs
justifier et garder un Etat quelconque, démocratique ou non, sans approuver et
appuyer le rapport permanant de violence : qu’elle soit légitime ou
criminelle, qui le constitue et sur laquelle il a été constitué. Si l'idéologie
dominante a amené les populations au niveau de stupidité ou confusion
nécessaire pour pouvoir leur faire croire que la politique française n'est pas
violence, comme elle n'est pas Nationalisme, cela prouve seulement la portée
inouïe des monopoles de violence étatiques et des monopoles assortis de
conditionnement et intoxication idéologiques des masses.
Pour ce qui est du
“terrorisme”, les journées et les siècles “qui ont fait la France” en sont
combles. C'est à
Pour l’idéologie
dominante, les termes de ‘violence’ et ‘terrorisme’ signifient ce que, selon le
cas, le pouvoir établi décide qu’ils signifient. Ils n’ont pas d’acception
univoque. Ils correspondent à une amalgame de significations diverses – formellement
contradictoires mais idéologiquement intégrées – que se succèdent, s’accumulent
ou se combinent selon les exigences de la propagande, la guerre psychologique
et la pratique politique.
Ainsi, la technique
idéologique fasciste et impérialiste au sujet de la violence joue sur plusieurs
volets : formellement contradictoires mais intégrés dans un amalgame aussi
confus qu’idéologiquement fonctionnelle. Sur un premier terme, “on” joue sur
“le refus de toute violence”, de façon à proclamer la pureté non violente du
régime. Cela permet la récupération frauduleuse et équivoque de notations et
connotations positives et négatives, de façon à conditionner la réaction
émotionnelle et affective des groupes sociaux craignant la violence :
historiquement punis, fragilisés ou infantilisés. Ensuite, et si
l’incompatibilité entre cette pureté non-violente du régime qui est affichée,
et la réalité des institutions politiques – donc constituées par la violence –
devienne peut-être mis en évidence dans le débat théorique qui peut-il
s’ensuivre, cela amène les théoriciens de l’impérialisme à un éventuel repli
tactique sur une deuxième ligne de défense de leur position, qui est
formellement contradictoire avec la première. “Ce n’est pas ce qu’on voulait
dire”, répondent-ils. (Mais ils le disent quand même, tant que ça marche. Et
ils le rediront, dès qu’un autre interlocuteur donnera les signes d’stupidité
qu’en feront une victime idéale de plus, ou des que le monopole publique de
répression et conditionnement de masse garantira l’expression solitaire des
théoriciens du régime.)
Contraints à ce
repli tactique, les idéologues de l’impérialisme recourent alors à des idées
plus étroites et qualifiées de violence: ‘violence bonne’ contre ‘violence
mauvaise’, ‘violence défensive’ contre ‘violence offensive’ ;
étant la ‘bonne violence’ toujours la leur, et ‘la mauvais’ étant
celui des autres. Comme nous l’avons déjà indiqué, cela est en contradiction
formelle avec le rejet initial “de toute violence” dont ils sont partis, et
avec leur énoncé de base corrélatif, à savoir : que “toute violence est
intrinsèquement mauvaise”, car s’il y a une bonne violence, alors “PAS TOUTE”
violence est mauvaise. Face à cette difficulté, la solution à laquelle “on” en
arrive, consiste à déplier et décomposer les termes et les concepts pour cacher
l’essence : ontologiquement et matériellement identique, de toute
violence.
De cette façon, les
termes ‘coercition et force’ : revêtues de connotation positive grâce au
conditionnement idéologique, correspondent et sont ceux utilisés lorsqu’il
s’agit de nommer sa propre violence, qui est si bonne qu’elle n’est pas et
n’est même pas appelée ‘violence’. Ces termes: ‘coercition ou force’, restent
donc “différenciées et opposées” au terme ‘violence’, d’une connotation négative,
qui est et correspond toujours à ce que font les autres. Avec cela, on peut se
tourner vers le point de départ, à savoir : “le rejet de toute violence”,
puisque – par désignation décisoire – ‘violence’ est et est appelée uniquement
ce que les autres font contre soi-même, et non ce que l’on fait contre les
autres. Disparu même le nom qui rappelle la violence monopolistique de l’Etat,
nous sommes informés ensuite que: “le droit c‘est la force”; “le Gouvernement
poursuivra le terrorisme avec toute la force de l’État de droit”; “En Corse, le
Gouvernement de la République s’opposera contre la violence par la pleine force
de l’Etat de droit” etc.
Il s’agit, avant
tout, d’empêcher que la question vraie et unique qui importe soit visualisée, à
savoir : si la ‘violence/coercition/force’ (termes différents pour
désigner une même réalité matérielle), ainsi que la légalité ou expression
juridique qui est fondée sur cette réalité matérielle de violence, sont
appliquées pour la défense des droits humains fondamentaux et surtout du droit
de libre disposition ou autodétermination des Peuples : premier des droits
humains fondamentaux et la condition préalable de tous selon la Loi
International, auquel cas il s’agit d’une ‘violence/coercition/force’ et d’une
légalité légitimes; ou si, au contraire, elles sont appliquées à la violation
de ces droits fondamentaux, auquel cas il s’agit d’une ‘violence’ etc. et d’une
légalité illégitimes et criminelles. “Logiquement”, tout cela est caché par les
idéologues de l’impérialisme.
Finalement, et par
une approche pratique, technique et strictement légal, ces idéologues et
légistes déterminent par construction décisoire le terme et le concept de
‘violence politique’, désormais identiques de ceux de ‘terrorisme’.
“Par conséquent”, c’est ‘terrorisme’
toute opposition réelle ou virtuelle au gouvernement français ; ne l’est
pas ce que le gouvernement français est ou fait. Une interprétation
super-extensive, établie à l’aide des critères d’analogie, de responsabilité,
de résultat et de situation sociale : notamment formulés et mis en
pratique par les régimes totalitaires de l’avant-guerre, fait que le délit de
“terrorisme”, sous la poussé de la crise de l’ordre et le désordre
internationaux, devient le seul délit (politique) par incorporation et
assimilation de tous les autres. “On” évite ainsi – par l’évidence vide mais
sans recours du truisme – tout éventuel problème de qualification ou
imputation.
Dans cette délibérée
incohérence formelle des idées concernant la violence et le terrorisme, se
manifeste la opposition classique entre “l’idéologie de la réalité et
l’idéologie de l’illusion” ; une opposition que se développe par la
“division du travail entre idéologues de la réalité et idéologues de
l’illusion”, et qui correspond, organiquement, à “l’opposition” entre les
monopoles de la violence, d’un côté, et les monopoles de propagande,
conditionnement idéologique et guerre psychologique, de l’autre.
Lorsque le Conseil
municipal de St. Jean de Luz, sous la direction (RPR) du maire Nationaliste –
français – Larramendi (élu officieuse du Pnv), “condamnait toute violence d’où
qu’elle vienne”, tout en demandant “en conséquence” au Ministre de l’Intérieur
l’envoi de renforts de police, on savait bien qu’on ne pouvait pas aller plus
loin dans le domaine de la mystification et l’irrationnel idéologiques. Il aura
fallu attendre le Nationalisme contemporain pour atteindre ce degré de formelle
mais fonctionnelle stupidité. Le successeur (RPR aussi) de Larramendi en la
maire assume désormais sans aucun problème sa fonction municipale non-violente
à la charge cumulée de Ministre de la guerre non-violent, avec les armes
atomiques de destruction massive comme l’arme non-violent fondamentale, sans
provoquer pour autant des remous dans le Consistoire.
Après étude serrée,
sans doute, des moyens de la guerre “défensive”: dès la Grande Muraille aux
Longs Murs d’Athènes, dès la Ligne Maginot à la Guerre des Étoiles, dès les
soldats de l’An II à la guerre de Vendée, dès l’Armée Populaire suisse aux
grèves de 1915; après avoir dépassé des trop prussiennes considérations sur les
rapports entre l’attaque et la défense en tactique et en stratégie, et sur les
conditions nationales, géographiques, économiques, techniques, morales ou
humanitaires de l’armement du peuple; après avoir dépassé Jaurès lui-même et
son Armée du peuple, le nationalisme français moderne a tranché en faveur de
l’armée gouvernementale professionnelle strictement défensive, dissuasive,
pacifique et non-violente dont la “force de frappe” est le moyen fondamental.
Bien sûr, il n’est
pas question d’utiliser l’arme atomique, il s’agit seulement de faire peur. Les
services d’illusionnisme idéologique espèrent bien que les âmes candides et
non-violents voudront les croire, tout en escomptant que “l’ennemi” ne les
croira pas, parce que s’il les croyait, la force de frappe ne vaudrait pas
pipette tout en coutant diablement cher. Une arme n’est pas une arme sans la
volonté de s’en servir en tant que arme, et n’a pas de virtualité dissuasive
sans la crédibilité de cette volonté. Du point de vue dissuasif mieux vaut une
volonté inexistante mais affichée, qu’une volonté réelle mais désavouée. Encore
une fois: le double discours, formellement contradictoire, est cependant
idéologiquement rentable, à ce qu’il parait.
En tout cas, l’arme
suprême de la terreur fait l’unanimité des Nationalistes français “de droite et
de gauche”, laïques ou cléricaux, qui par ailleurs n’hésitent pas par ailleurs
à condamner toute violence d’où qu’elle vienne. (L’exception terroriste est
sans doute inséparable de l’exception culturelle et de toutes les autres
exceptions dont bénéficie le nationalisme français, lui-même exceptionnel dans
son ensemble.) La “gauche” nationaliste, si sensible et opposée à toute forme
de violence venant des autres, a eu peut-être beaucoup de mal à s’en accommoder
a cette unanimité ; mais leur adaptation c’est désormais chose faite et aux
dernières nouvelles ses leaders et supporters se portent bien. D’ailleurs –
fait rassurant – le Ministère de la guerre a disparu depuis longtemps pour laisser
la place à celui de la défense. Toute velléité de guerre offensive est
désormais écartée – semble-t-il – des émotions nationales françaises. (On sait
sûr, en tout cas, que
Mais le Gouvernement
français exige sans relâche le renoncement à toute violence en Corse, comme il
l’a fait en Algérie, à Madagascar ou en Indochine, tout en renforçant sans
cesse son propre monopole de la violence sur l’île conquise et occupée par le
sang et le feu. Pendant ce temps son Marseillaise, pénalement protégé, continue
d’inciter à abreuver la terre avec le sang impur des autres.
De leur côté, les
Évêques de France ont solennellement proclamé dans une pastorale non seulement
le droit mais l’obligation qui ont les Français de l’utiliser l’arme nucléaire
“en cas de besoin” (quand même). (Dans ces choses-là, la moral ecclésiastique
est très exigeante, et sa casuistique extrêmement stricte: on ne devrait, sans
plus, par goût ou simple caprice, lâcher des bombes dont la capacité cherchée
et l’objectif initial officiellement avoué – pour ceux qui ne se font pas une
idée très claire de ce que “force de frappe et armes de dissuasion” veut dire –
c’était de liquider en quelques heures cinquante millions de personnes humaines
de tout sexe et condition.)
Comme résultat d’une
telle position épiscopale, même Toulat avait dû interrompre là sa série
d’articles de dénonciation de la violence et d’exaltation de la non-violence,
en proie á un besoin soudain, urgent, pressant et opportun de s’attaquer à une
nouvelle suite thématique au sujet de l’Immaculée Conception. Ça n’a pas été le
cas pour l’Evêque des Basses Pyrénées: il condamne sans nuance et avec la plus
grande fermeté toute violence d’où qu’elle vienne, hormis des monopoles
françaises (et espagnoles) de violence dans les territoires occupés des Peuples
subjugués par l’Impérialisme français (et espagnol). Il condamne les attentats,
mais affirme la nécessité et la légalité des forces de répression français, de
la police française, de la “Justice” française, et des prisons françaises. Msr.
Moleres n’aime pas les petites bombes, il affectionne exclusivement les grosses
bombes: si possible nucléaires, mais toujours utilisées par l’armée française
au service du Nationalisme français.
Pour ce qui est des “attentats” terroristes, la “gauche” nationaliste s’en est fait une spécialité, battant largement la “droite” à ce jeu, des exploits de Nouvelle Zélande et de Nouvelle Calédonie aux accords de Latché et ses suites. Leur traitement par les services d’intoxication du gouvernement social-chauvin n’a pour autant pas incommodé le profond sens éthique d’Espilondo, ni son choix sans compromis du parler vrai et clair. Et pourtant, ces “affaires très spéciales” (vid. P. Aussaresses; ‘Services Spéciaux. Algérie 1955-1957’) de la “gauche” nationaliste au pouvoir, ces assassinats terroristes en série déclenchés sur la même Côte Basque ne sont qu’une partie infime dans le système de violence qui constitue l’impérialisme français; tout comme la corruption et les attentats financiers ne sont qu’une partie infime du système d’extorsion et corruption qui sous-tend l’économie impérialiste. Il est connu que, en France comme ailleurs, la corruption a toujours été la spécialité “naturelle” de la “gauche”, elle a les conditions pour ça.
X
“Comme le disait
Jaurès, dans mon opinion le nationalisme porte en soi la violence comme les
nuages portent la tempête.” Pour des raisons diverses de psychologie
collective, Jaurès se trouve être le plus populaire des politiciens français
toutes époques réunies, avec Henri IV et Arlette Laguillier. En assumant, avec
toutes les conséquences, le nationalisme et la culture de la nation dominante,
Espilondo a aussi compris le profit qu’on peut en tirer pour la tâche sacrée
dont il s’est fait le serviteur enragé. On voit bien que dans le Jaurèssic Park
du nationalisme français on peut faire les plus mauvaises rencontres.
Il faut donc revenir
sur les textes et les contextes historiques pour mesurer l’hypocrisie, le
manque de scrupules et la xénophobie exacerbée dont la “gauche” Nationaliste
française (comme celle d’Espagne) fait preuve dans sa haine et sa fureur à
l’encontre du peuple basque. Parce que, apparemment, pour ça les Nationalistes
français ont même besoin de détourner, de fausser sans vergogne et de calomnier
Jaurès.
Jaurès ne pensait
pas que “les travailleurs n’ont pas de patrie”; en tout cas les travailleurs
français en avaient bien une. Il disait que le patriotisme s’enracine dans “la
physiologie de l’homme”, ce qui en rendait l’éradication particulièrement
délicate pour le sujet organique, et d’autant plus inquiétante pour
l’humaniste. “Chaque conscience individuelle, jusque dans les formes
individuelles de l’instinct de conservation, est enveloppé par la conscience
nationale.” “Lorsqu’elle vibre au signal donné par la liberté en péril, toute
âme sait qu’elle est à l’unisson de
D’autre part,
puisque toute reconnaissance des Nations dominées par l’impérialisme – ainsi
que de leur droit inhérent de libre disposition ou autodétermination – était exclue,
il faut ramener à sa vraie dimension l’attitude de Jaurès envers les cultures
des peuples européens annexés à
Jaurès était Occitan
d’origine, comme Rivarol, Barrère, Combes, Doumergue et tant d’autres
Nationalistes français qui s’étaient attachés à la lutte contre “cette
diversité d’idiomes grossiers” et de cultures “enfantines et barbares” : foyers
naturels de “féodalisme et séparatisme” ; ceux-ci, bizarrement, sévissant toujours – malgré le totalitarisme et le Terrorisme d’Etat – parmi
des nationalités qui “s’étaient pourtant ralliées dans l’enthousiasme et
l’adhésion du cœur”. Jaurès parlait couramment sa langue d’Oc, qu’il appelait
“patois”, quoiqu’il trouvât ce nom “grossier”. Il s’en servait pour ses
campagnes électorales, et même pour faire des blagues à l’Assemblée. Il s’était
rapproché des Félibres et déclaré en faveur de “l’enseignement de ces langues”
que
La République avait
déjà connu la “tolérance” de 1790-1793.
Le républicain
Jaurès était sans doute plus sincère que son “disciple” Espilondo et autres
“partisans de l’enseignement du basque” sous le monopole de “l’Education
nationale”. Mais, dans la mesure où le contexte politique et linguistique n’est
pas le même, l’enjeu posé par le maintien actuel de la Langue (avec les moyens
supposés pour y parvenir) n’est pas perçus de la même façon; et c’est que ce
prétendu et impossible “bilinguisme” qui nous est offert aujourd’hui : fondé
sur l’assujettissement national/étatique de notre Peuple, n’empêche pas mais
implique l’humiliation et entraîne la liquidation de la Langue “enseignée”.
“L’enseignement” de ces Langues, et d’autres mesures semblables, sont destinées
à tromper et récupérer les Peuples assujettis. “Notre mission est d’aider les
langues minoritaires à mourir doucement.” (Morvan.)
Les langues sont nationales ou elles ne sont pas. Les langues “secondaires, minoritaires, locales ou régionales” : ça n’existe pas et ne peut pas exister ; pas plus que leurs cultures et leurs Peuples, dont elles sont inséparables. L’impérialisme le sait, parfois il le dit, ses victimes ne s’en rendent pas toujours compte. Continuons, cependant, avec l’analyse des vraies affirmations de Jaurès.
XI
Même si sa méthode
caractéristique - où se combinent de façon très éclectique et personnelle
idéalisme et matérialisme, illusionnisme et réalisme, Nationalisme impérialiste
et internationalisme, réforme et révolution, violence et pacifisme - rends
souvent subjectives et provisoires les appréciations, difficiles les synthèses
et incertaines les conclusions, néanmoins Jaurès n’ignorait pas les rapports
d’implication mutuelle entre la guerre, le Nationalisme impérialiste,
l’impérialisme et le capitalisme. Leurs contraires: la paix,
l’internationalisme, la liberté nationale et le socialisme s’avérant en tout point
problématiques, il comptait cependant pour les sauvegarder sur une panoplie
varié et classique: le respect des libertés, le souci de la justice et de la
paix, les accords internationaux, le système de garanties, l’arbitrage
international, l’abandon des traités secrets, le respect du ‘status quo’ contre
des nouvelles annexions, l’équilibre des puissances, la défense nationale et
l’armée populaire, le désarmement simultané,
Jaurès ne s’est
jamais prétendu “contraire à toute violence d’où qu’elle vienne”. Il comptait
sur elle. Il fallait s’en servir en cas de besoin ; ce en quoi tout le
monde ou presque se trouvait être bien d’accord :
“L’internationale
recommande aux prolétaires d’éviter la guerre, mais elle leur prescrit de sauvegarder
l’indépendance des nations.” “Notre projet est d’accroitre la puissance
défensive de la France.” “On me dit: ‘Il faut encore des canons’, comme si je
déclarais inutile en ce moment la préparation matérielle de la guerre.” “Que
nous ayons, comme nous l’espérons bien,
Bien entendu Jaurès
réprouvait les attentats anarchistes ou prétendus tels, d’autant plus qu’ils
avaient permis aux députés de voter les “lois scélérates” qui limitaient à
nouveau les libertés républicaines et exposaient l’opposition - donc son propre
parti - à une répression accrue et de plus en plus arbitraire. Jaurès demandait
que les grands financiers et les politiciens corrompus à leur solde :
responsables de tant de crimes, fussent poursuivis pour provocation aux actes
de propagande anarchiste. Plus loin allait Lénine qui, tout en montrant la
nécessité de la lutte légale et illégale, montrait aussi les limites et le
caractère illusoire du “terrorisme individuel”. Partout, comme au Pays Basque,
les attentats : produit de la faiblesse et l’immaturité des forces
populaires, ont été provoqués, manipulées ou utilisés par la réaction
Nationaliste, impérialiste et totalitaire, en tant que prétexte et alibi de la
répression et la terreur contre toutes les libertés démocratiques et contre
toutes les formes de résistance à l’oppression.
(Dans ce domaine
idéologique les oppositions sont souvent trompeuses, et les conceptions
biologiques, physiologiques et raciales de Jaurès s’accordent sans difficulté
avec l’spiritualisme et l’angélisme désincarnés d’Espilondo et sa clique
nationaliste d’Anglet: “Je ne dénie pas à ces gens le droit de penser
différemment; je leur dénie le droit à la violence. Celui qui prend une arme
connaît les risques, qu'il les accepte et c'est tout, et qu'il n'envoie pas les
gens pleurer ou manifester”.)
En 1885 Jaurès avait
voté les crédits de guerre pour le Tonkin. En 1887, au moment de l’affaire
Schnæbelé, il était pour les crédits militaires pour l'Algérie dans “le silence patriotique
des parlementaires.” En 1903, il demandait le budget de “la pénétration
pacifique” au Maroc. En 1904, Guesde lui reprochait de “voter les budgets de la
guerre et de la marine”; ce que Jaurès avait personnellement évité de faire.
Mais “Les vôtres les ont votés – disait Guesde cette année-là, s’adressant à Jaurès et au PsF. Votre erreur est dans votre conception
socialiste qui n’a rien de socialiste; vous faites surgir votre socialisme de
L’armée populaire et
défensive, “L’Armée nouvelle” de Jaurès, devait être l’instrument du peuple,
autant en vue de la “défense nationale” (la lecture de Clausewitz avait porté
ses fruits) qu’à l’égard de son propre gouvernement et, par là même, le garant
de la paix mondiale. Ce qui posait tant de questions que tout l’ensemble des
problèmes politiques – sur la nature du pouvoir, la démocratie et le
socialisme, les relations et les institutions internationales, l’impérialisme,
la révolution, la guerre défensive ou offensive – se trouvait posée en même
temps. (Il n’est pas facile de discerner dans quelle mesure l’Armée populaire
résout les conflits, ou les suppose résolus.)
Même si - avant ou
après avoir vu Ferry à l’œuvre - on ne saurait rien ignorer de l’unité profonde
entre armée, enseignement et impérialisme, on peut se poser des questions sur
l’idonéité de l’éducation militaire pour “élever le niveau de la race”, comme
Jaurès lui donnait pour mission. Le patriotisme “tient par ses racines mêmes”
“à la physiologie de l’homme”, mais il est permis d’abriter des doutes sur les
effets en retour de l’éducation militaire sur le génotype et le phénotype
républicains. Le manuel d’instruction militaire était plus explicite qui
prescrivait d’imbuer dans l’esprit des recrues “le sens de la supériorité de la
race”. Peut-être les études scientifiques - qui ne tardèrent pas à établir que
l’urine allemande avait un taux d’acidité très supérieur à celui de l’urine
française - ont aidé à la saisir (la supériorité, non l’urine).
(Des études
comparées sur les spécifiées des taux d’acidité urinaire des sénégalais,
basques et autres recrues de l’armée républicaine font malheureusement défaut,
des échantillons fiables n’ayant même pas été ramassés à la source, s’il nous
est permis de désigner ainsi l’organe distributeur.)
Puisque “français
est un nom ethnique”, selon le Petit Larousse, on pourrait dire tout simplement
“urine républicaine”; ce qui évite tout ethnicise formel et le recours aux
mélanges, les moyennes ou les procédés statistiques aussi manipulables que
l’objet d’étude. Ou encore établir constitutionnellement que l’urine française
es l’urine de la République; ce qui a des précédents linguistiques et ne manque
pas d’allure. Les Empires Centraux n’avaient pas besoin d’en arriver là,
l’urine ethnique étant censée correspondre en gros, sinon au détail, à l’urine
impériale.
À un niveau plus
général, des rapports univoques entre acidité urinaire, agressivité nationale
et nationalisme impérialiste n’ont encore pu être établis. L’implication de
l’urologie dans la sociologie présente des difficultés épistémologiques qui
rendent hasardeuses les hypothèses, et peu fiables les conclusions.
Les savants les plus
naïfs ont été obligés de constater que “la science elle-même a perdu sa sereine
impartialité. Ses serviteurs, exaspérés au plus haut degré, lui empruntent des
armes à fin de pouvoir contribuer, à leur tour, à terrasser l’ennemi.
L’anthropologiste cherche à prouver que l’adversaire appartient à une race
inférieure et dégénéré; le psychiatre diagnostique chez lui des troubles
intellectuels et psychiques”. (S. Freud.)
“Les considérations
qui précèdent nous apportent déjà une première consolation, en nous montrant
que la tristesse et la douloureuse déception que nous avons éprouvées à la vue
des actes, si peu conformes à notre idée de la vie civilisée, dont se sont
rendus coupables nos concitoyens du monde, n'étaient pas justifiées. En
réalité, nos concitoyens du monde ne sont pas tombés si bas que nous l’avions
cru, pour la simple raison qu’ils n’étaient pas à un niveau aussi élevé que
nous nous l’étions imaginés. Ayant laissé tomber, les uns à l'égard des autres,
les restrictions morales, les grands individus humains, peuples et états, ont
cru pouvoir se soustraire momentanément aux obligations découlant de la vie
civilisée et donner libre cours à leurs penchants refoulés, avides de
satisfaction. [...]; ce qu'il y a de primitif dans notre vie psychique est, au
sens littéral du mot, impérissable. [...].
“Mais nous avons
constaté chez nos concitoyens du monde un autre symptôme qui ne nous a
peut-être pas moins surpris et effrayés que la baisse, si douloureuse pour
nous, de leur niveau moral. Je fais allusion à leur manque d’intelligence, à
leur stupide obstination, à leur inaccessibilité aux arguments les plus
convaincants, à la crédulité enfantine avec laquelle ils acceptent les
affirmations les plus discutables. [...]. Les philosophes et les connaisseurs
d'hommes nous ont dit depuis longtemps que nous avions tort de considérer notre
intelligence comme une force indépendante, et de ne pas tenir compte de sa
subordination à la vie affective. Notre intellect ne peut travailler
efficacement que pour autant qu’il soit soustrait à des influences affectives
trop intenses; dans le cas contraire, il se comporte tout simplement comme un
instrument au service d’une volonté, et il produit le résultat que celle-ci lui
inculque. Les arguments logiques ne peuvent donc rien contre les intérêts
affectifs, et c’est pourquoi la lutte à coup de raisons est si stérile dans le
monde des intérêts. [...]; mais il semble que, pour le moment, les peuples
obéissent plus à la voix de leurs passions qu’à celle de leurs intérêts. Ils ne
mettent en avant leurs intérêts que pour rationaliser leurs passions, pour
pouvoir justifier la satisfaction qu’ils cherchent à leur accorder.
“Pourquoi les
individus ethniques se méprisent-ils en général les uns les autres, se
haïssent-ils, s'exècrent-ils? C’est là un mystère dont le sens m'échappe.” Etc.
(Sigmund Freud; ‘Considérations actuelles sur la guerre et sur la morte’, 1915.)
En fait, la science et la raison ont toujours été au service des instincts et de l’affectivité des humains, et il n’y a pas de raison de croire que cela va changer à l’avenir. “Une opinion très répandue que, d’ailleurs, partagent certains philosophes contemporains veut que tous les types de comportement servant au bien-être de la communauté soient dictés par une pensée rationnelle, spécifiquement humaine. Non seulement cette opinion est fausse, mais c’est le contraire qui est vrai.” (K. Lorenz, ‘On aggression’, 1966.)
XII
Certainement,
l’attitude de Jaurès concernant le Nationalisme, la paix, la violence et
l’impérialisme, n’avait rien d’extraordinaire par rapport aux tendances
dominantes dans la Deuxième Internationale. En réalité, ceux qui s’opposaient à
l’impérialisme et à la guerre impérialiste en général étaient une très petite
minorité. Le droit de libre disposition ou autodétermination de tous les
Peuples : étant par définition la pierre de base de toute alternative à l’impérialisme,
il était nié, traité, adapté ou falsifié de façon à le rendre inoffensif pour
soi-même et dangereux pour les autres. La plupart des Etats condamnaient le
Nationalisme, l’impérialisme, le militarisme et les guerres des autres,
privilégiant en même temps le Nationalisme, l’impérialisme, le militarisme et
les guerres que menaient eux-mêmes et leurs alliés actuels ou virtuels. Mais
c’est que, étant le cas de leur propre nation, personne ne pouvait même
imaginer que cela était, à proprement parler, impérialisme mais “œuvre de
liberté, civilisatrice et humanitaire; et défense nationale contre les
agressions et les annexions”. Et puis, “si nous ne le faisons pas, d’autres le
feront” était l’alibi de tout le monde contre tout le monde. Pas besoin de se
dire “socialiste “ pour ça, si ce n’est pour essayer de mieux tromper les
Peuples.
Selon Manuel Irujo,
“Ce qu’on appelle empire colonial portugais, donc, au lieu d’être un obstacle
signifie une grande possibilité pour le futur si, derrière ces territoires, on
peut situer une politique de communauté ibérique définie et résolue. Il
convient de ne pas oublier, en plus, que les territoires coloniaux lusitains,
unis au Portugal, comprennent quatre cinquièmes de la population totale de
l’Etat espagnol avec ses colonies et protectorats, et multiplient plusieurs
fois l’extension territoriale de son sol et la potentialité de son économie”.
“C’est à quoi on ne saurait pas retourner c’est à l’abandon de la jungle à la
vie sauvage; et ce que le sens de responsabilité – d’autres motifs de réalité
évidente mis à part – nous empêchera en toute éventualité de faire c’est
d’amener des colonies les pavillons du Portugal et de l’Espagne pour qu’ils y
soient hissés ceux de nations étrangères au domaine ibérique.”
Cette adhésion
apologétique au Nationalisme-impérialisme lusitaine-espagnol a été écrite en
1945 par un haut dirigeant exilé du Pnv, ex-ministre de la République
espagnole, et édité à Buenos Aires par un éditeur de la même tendance; ce qui
montre à quel point les Nationalismes, les Empires et les Ministères sont
contagieux, même parmi ceux qui sont censés d’en être les victimes. “Toutes les
libertés sont solidaires”, était une maxime que le même auteur répétait
souvent. Ainsi va, en règle générale, de la “solidarité” entre les Peuples
opprimés à travers le monde. C’est ainsi que le même parti “nationaliste
basque” reconnait aujourd’hui comme “légitimes, démocratiques et non-violents”
les régimes d’occupation d’Espagne et de la France au Pays Basque. Il y a des
pentes où l’on ne s’arrête pas.
L’humaniste-républicain-opportuniste-socialiste
Jaurès admirait Ferry, “cet homme remarquable – a-t-il dit – qui depuis trente
ans avait brusquement déplacé vers les pays lointains le centre de gravité de
la France”, et qui avait pour but rien moins que “d’organiser l’humanité sans
dieu et sans roi”. En attendant, à la Commune, il “réussit comme maire de Paris
pendant le siège à tirer par escroquerie une fortune de la famine”, notait
Marx. Après avoir mis l’Europe entière à feu et à sang “pour la libérer”, en la
soumettant, le Nationalisme impérialiste français a bien été obligé de se
reporter sur les sauvages et les barbares d’outre-mer. “On se préparait à
donner aux autres la place à laquelle nous avions droit.”
De 1879 à 1885,
Ferry relançait “l’expansion de la civilisation française”. “Cet homme
remarquable” exposait volontiers “les motifs qui doivent pousser une grande
nation vers l’impérialisme”:
“La politique
coloniale est la fille de la politique industrielle. [...] La fondation d’une
colonie c’est la création d’un débouché. Les colonies sont pour les pays riches
un placement de capitaux des plus avantageux. La France, qui regorge de
capitaux, a intérêt à considérer ce côté de la question. Les colonies ouvrent
aux pays français des débouchés illimités. Mais, pour que ce but économique
soit atteint, il faut ne pas se contenter de simples installations
commerciales. [...] Messieurs, il y a un second point, un second ordre d’idées
que je dois également aborder [...]: c’est le côté humanitaire et civilisateur
de la question. [...] Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai! Il faut
dire ouvertement qu’en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des
races inférieures. [...] Je répète qu’il y a pour les races supérieures un
droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser
les races inférieures. [...].
“Ces devoirs ont
souvent été méconnus dans l'histoire des siècles précédents, et certainement
quand les soldats et les explorateurs espagnols introduisaient l'esclavage dans
l'Amérique centrale, ils n'accomplissaient pas leur devoir d'hommes de race
supérieure. Mais de nos jours, je soutiens que les nations européennes
s'acquittent avec largeur, grandeur et honnêteté de ce devoir supérieur de la
civilisation. [...] Est-ce que vous pouvez nier, est-ce que quelqu'un peut nier
qu'il y a plus de justice, plus d'ordre matériel et moral, plus d'équité, plus
de vertus sociales dans l'Afrique du Nord depuis que la France a fait sa
conquête? [...].
“Si la France
voulait rester un grand pays exerçant sur les destinées de l’Europe toute
l’influence qui lui appartient”, elle se devait de “porter partout où elle le
peut sa langue, ses mœurs, son drapeau, ses armes et son génie”. “Aujourd’hui
ce sont des continents que l’on annexe, c’est l’immensité que l’on partage.”
“Toutes les parcelles du domaine colonial de la France, toutes ces épaves
doivent être sacrées pour nous.” “Il est indispensable de fonder la
colonisation sur la domination.” (Discours de Jules Ferry à la Chambre des
députés en juillet-1885.)
“Cet homme
remarquable” avait déclaré donc à la Chambre en 1881: “Nous avons envoyé dans
le Sud des forces imposantes, afin de réduire les populations arabes, l’esprit
arabe, par la seule démonstration qu’ils comprennent: celle de la force. Nous
avons voulu faire voir à ces tribus barbares et insoumises ce que c’est qu’une
armée française”. C’est serait trop long de décrire ici comment la
démonstration a été faite. “Les Français ont, en quelques années, commis plus de
cruautés que les Turcs en deux cents ans”, disait déjà le député Roger à la
Chambre en 1834. Dès 1847 Tocqueville rapportait: “Autour de nous les lumières
se sont éteintes, le recrutement des hommes de religion et des hommes de loi a
cessé; c’est-à-dire que nous avons rendu la société musulmane beaucoup plus
misérable, plus désordonné, plus ignorante et plus barbare qu’elle n’était
avant de nous connaitre”. (Rapport sur le projet de loi relatif aux crédits
extraordinaires demandés pour l’Algérie, 1847.)
Exclusion,
extermination, remplacement des populations par des colonies de peuplement,
pillage et exploitation, déculturation et francisation forcée culturelle et
linguistique, c’est ainsi que le Nationalisme impérialiste français a toujours
entendu l’œuvre de civilisation. Il fallait “civiliser les arabes par des
moyens hors la civilisation”. Comme l’écrivait le colonel Montagnac en 1843,
faisant le récit satisfait et l’apologie de ses propres crimes: “faire la
guerre aux arabes” cela veut dire, “en un mot, anéantir tout ce qui ne rampera
pas à nos pieds comme des chiens”. Selon la déclaration officielle pour
l’Algérie en 1858, “Nous sommes en présence d’une nationalité armé et vivace
qu’il faut éteindre par l’assimilation”, “la dislocation du peuple arabe et la
fusion”. Selon Guérin, “À l’origine [...], les militaires ont songé à ‘refouler
au loin, à exterminer la population indigène’. Par la suite, l’entreprise s’est
avérée impossible. Mais, faute de pouvoir faire disparaître physiquement
l’autochtone, on a voulu le briser spirituellement et moralement”. “On a essayé
de tuer l’âme de ce pays. On l’a conquis pour en faire une colonie de
peuplement, pour l’annexer à la métropole.”
À cette époque, si
la guerre, la répression, la famine et les épidémies décimaient la population,
on constatait tout simplement que “les peuples arriérés disparaissaient devant
les peuples supérieurs”. Selon Y. Person “Il est significatif que ce soit le
même notable de la IIIe République, Jules Ferry (ce qui a donné à
l’enseignement laïc qu’il a organisé l’orientation d’un génocide culturel
systématique), qui a incarné l’engagement de la France dans l’impérialisme
colonial de la fin du XIXe siècle. Au moment où l’impérialisme britannique,
avant tout soucieux d’exploitation économique, revenait à un certain respect de
la personnalité de l’Autre, la France se vouait résolument à détruire toutes
les cultures qu’elle pouvait rencontrer sur un secteur aussi large que possible
de la planète”.
Partout au travers
du monde, le Nationalisme français portait la violence comme les nuages portent
la tempête. La conquête de l’Algérie, de la Tunisie, du Maroc, de l’Indochine,
de Madagascar, du Sénégal, du Niger etc. – par les armées que commandaient
Duperré, Bourmont, Savary, Trezel, Bernard, Clauzel, Berthézène, Boyer,
Saint-Arnaud, Montagnac, Baraguey, Valée, Bugeaud, Damrémont, Aumale,
Joinville, Bedeau, Soult, Pélissier, Randon, Febvrier, Rigault, Page, Dariès,
Charner, Lapierre, Protet, Faidherbe, Trochu, Chanzy, Négrier, Bonard,
Grandière, Mac-Mahon, Bazaine, Garnier, Rivière, Courbet, Forgemol, Hetzinger,
Duchesne, Gallieni, Drude, Amade, Moinier, Lyautey, Mangin, Gouroud, Azan,
Noguès, Voulet, Schmartz, Holl, Pétain, Argenlieu et Hautecloque – est la
politique de guerre, Terrorisme de masse, et massacres d’hommes, de femmes et
d’enfants dans des conditions atroces ; de terre brulée avec incendie, destruction
et pillage des villages, des récoltes et des cultures. Ce n’étaient pas là des
bavures, “accidents rares et regrettables”, c’étaient la logique propre du
système Nationaliste-impérialiste français. “Grâce à eux la France a un
empire.” “La guerre a ses nécessités.” “Qui veux la fin veut les moyens, quoi
qu’en disent nos philanthropes.”
Et pourtant, en 1884
et à Albi (haut lieu, dans l’horrible dossier de “l’expansion de la
civilisation française” depuis le 13ème siècle), disait Jaurès: “La France a su
se faire aimer de tous les peuples coloniaux”. “Nous pouvons dire à ces
populations, sans les tromper, que jamais nous n'avons fait de mal à leurs
frères volontairement; que les premiers nous avons étendu aux hommes de couleur
la liberté des blancs et aboli l'esclavage; que là encore où la France est
établie on l'aime; que là où elle ne fait que passer on la regrette; que
partout sa lumière resplendit: elle est bienfaisante.” Apparemment l'humaniste,
sociologue et historien Jaurès croyait tout ce qu'il avait envie de croire et
ignorait tout ce qu’il voulait ignorer, ou ne reculait devant aucun mensonge.
Encore une fois de
plus, le romantisme colonialiste fait partie, très significative, du romantisme
nationaliste en général. Mais on ne rend pas compte de l’impérialisme par des
images d’Épinal pour enfants et pour adultes, et des récits à l’eau de rose
avec soldats, instituteurs, médecins, Pères Blancs et Sœurs Bleues protecteurs,
généreux, humains et dévoués. L’impérialisme ce sont des crimes de guerre, des
crimes contre la paix, des crimes contre l’humanité: il n’y a pas là le moins
du monde matière à idylle. (Finalement, l’entreprise criminelle est révélée par
des déclarations tels que les suivantes: “Ils me disent un meurtrier, oui; mais
je n’ai fait que mon devoir envers la France. L’ennemi ne peut être vaincu sans
recourir à la torture et aux exécutions sommaires. La torture devient légitime
lorsque l’urgence est imposée.” [Général Paul Aussaresses, ‘Services spéciaux.
Algérie 1955-1957’.])
(On a déjà noté que
pour le Racisme et le Nationalisme français ordinaires il ne saurait y avoir,
chez les colonisés, ni Peuple, ni Nation ni Etat, tout au plus des “populations”,
des “peuplades” ou des “tribus”, comme disait Jaurès. Dans l'idéologie
impérialiste le concept de “tribu” atteint une extension insoupçonnée: dès
conflits coloniaux en Afrique jusqu’à l'éclatement de la Yougoslavie).
Ces guerres
n’étaient même pas des guerres mais de mesures de rétablissement de l’ordre et
de pacification. Il est vrai que, comme le disait encore Lénine, “trop souvent
elles ressemblent moins à des guerres qu’à un sauvage massacre, à une
extermination de peuples désarmés”. “Voici le genre de guerre que l’on menait
contre eux: ils étaient désarmés, et on les exterminait à la mitrailleuse.
Sont-ce là des guerres? Mais non, ce ne sont même pas des guerres, à proprement
parler.”
Le soldat était
accompagné par le bureaucrate, l’instituteur, le capitaliste, le
concessionnaire, les gros et petit colons: républicains, cléricaux et
anticléricaux, ouvriers quarenthuitards, communards [from the Paris Commune] and Alsatians who in 1871 were fleeing from their annexation by Prussia et se retrouvaient en Afrique, Espagnols, Italiens, Maltais et Juifs
fuyant la misère ou les persécutions, tous devenus français, unis pour
l’exclusion, la spoliation, l’exploitation ou l’élimination des “races
inférieures”: “Il est difficile de faire entendre au colon européen qu’il
existe d’autres droits que les siens en pays arabe (sic), et que l’indigène
n’est pas une race taillable et corvéable à merci”, disait Ferry lui-même qui,
apparemment, n’y était pour rien.
Tous étaient accompagnés et souvent précédés par le missionnaire et l’ecclésiastique, “envoyés en éclaireurs par les marchands et les banquiers”, protégés et subventionnés par les gouvernements pour “une mission religieuse qui ouvrirait la voie à notre influence politique”. (Un illustre écrivain basque, Basagaitz – Lhande – y est allé de son panégyrique sur ‘Notre épopée missionnaire: Madagascar, 1832-1932’, qui précède de sept ans l’apologie bien plus problématique de A. Perbal: ‘Les missionnaires français et le nationalisme’.)
Comme partout (et on est ici, chez les Basques, aux premières loges pour le
savoir), l’Eglise a fait partie essentielle de l’appareil de conquête et
oppression. “C’est une véritable croisade que nous faisons ici”, disait “le
sinistre” Charles Mangin. Le “cas” de Douarre, celui du missionnaire-indicateur
Foucault et ses “renseignements” au 2e Bureau, ou les démêlés de Lavigerie avec
les “bureaux arabes” et Mac-Mahon, n’y changent évidemment rien: militaires,
civils et ecclésiastiques, malgré leur discordances, faisaient partie de la
même structure de domination nationaliste-impérialiste et, malgré les querelles
qui en 1906 ont abouti à la séparation entre eux, ils n’ont jamais interrompu
leur collaboration.
Tout comme dans le
mésopotamien monument de sa ville natale, “dans maintes localités la statue du
Cardinal Lavigerie gesticule dans son socle”, écrivait Guérin en 1953. Ici
comme ailleurs, “la ‘conquête spirituelle’ ne fut absolument pas une entreprise
distincte, parallèle, de la conquête militaire et de la colonisation
matérielle”; “fut au contraire si étroitement liée au processus général de
colonisation qu’elle n’en fut en fin de compte qu’un aspect ou qu’un moyen”.
L’impérialisme “moderne” a été, et continue d'être, “le lieu de rencontre du
capitalisme, du militarisme et du cléricalisme”.
On chercherait en vain des signes de mauvaise conscience. Ni les Etats conquérants, ni l’Eglise, n’ont jamais avoué, regretté ou essayé de réparer leurs crimes. Tout comme au Royaume de Navarre et ailleurs, ils voudraient et ils espèrent que tout ça est oublié, que le temps, la terreur et les massacres ont extirpé la mémoire historique de la conscience collective, et qu’ils pourront continuer, comme par le passé, à fouler aux pieds la liberté des Peuples.
XIII
À partir de 1903,
quand même, Jaurès commence à déchanter. Les choses ne se passent pas comme il
espérait, la note est même de plus en plus salée. “La France succombe sous un
empire colonial disproportionné à sa force d’expansion.” “Il y a en ce moment
tout un parti militaire et colonial qui rêve de mettre la main sur le Maroc par
une grande expédition. La France doit envoyer une sur le territoire marocain et
y établir par la force son protectorat. Politique insensée et vraiment
criminelle.” Ce que se préparait n’était pas, en effet, un secret pour
personne: “Etablissons ensemble un vaste domaine d’un seul tenant qui, du golfe
de Gabès à l’Atlantique, de la Méditerranée au grand désert, englobera
Pourtant Jaurès s’accrochait à ses espoirs. On a vu qu'il avait voté les crédits militaires pour le Tonkin en
1885 et s’était fortement congratulé en 1887 (au moment de l’affaire Schnæbelé)
des crédits militaires obtenus “dans le silence patriotique des
parlementaires”. Il demande maintenant “le budget de la pénétration pacifique”
au Maroc. “Oui, il est à désirer, dans l’intérêt des indigènes du Maroc comme
dans l’intérêt de
“Expansion pacifique
et raisonnable”. Si l’on croit son biographe Auclair, “Ces derniers mots: chers
à l’universitaire, cachaient au socialiste la loi de la jungle”. “Au début de
l’aventure marocaine il ne se montrera pas hostile à l’entreprise, il se
contentera, ingénument, de la vouloir pacifique.” “Il lui arrivait encore
d’espérer que de bonnes paroles, un système de garanties internationales (...)
en trois points (...), un échange constant de documents sérieux, seraient
capables de transformer les colons en apôtres, et les banquiers en
philanthropes.” Et – c’est Reberioux qui l’a écrit – “Il pense comme tant
d’autres, jusqu’à la fin de sa vie, que l’expansion coloniale aurait pu être
pacifique et que les secteurs les plus puissants du grand capital international
peuvent œuvrer au maintien de la paix”.
Or, “la science et
le socialisme” ont couvert toujours le Nationalisme impérialiste français. Car
c’est indéniable que – en tant que catégorie historique, et non délire
métaphysique – le colonialisme se constitue par la guerre, le pillage,
l’exploitation, l’asservissement et la destruction des peuples. Le colonialisme
pacifique et humain est une contradiction dans les termes. Le “bon
colonialisme” à la place du “mauvais”, le “colonialisme” pacifique et
raisonnable, économique et moral, dans l’intérêt harmonique ou harmonisé du
colonisateur et du colonisé, où civilisation française et civilisation tout
court s’identifient, cela n’a jamais existé. Même en idée, il traduit
l’arrogance, le racisme et la prétendue supériorité des “grandes” nations
colonisatrices. Il est aussi et surtout la couverture, l’alibi “humanitaire”,
l’hypothèse idéologique auxiliaire du nationalisme impérialiste réel. Qu’elle soit chrétienne, franc-maçonne, fasciste, socialo-communiste, de “gauche” ou de
droite, la peste nationaliste-impérialiste reste toujours la peste.
En connaisseur de
l’histoire de France et historien de
Le colonisé – c’est
bien connu – est sauvage, barbare, enfantin, dépourvu de raison, plat, borné,
attardé, sale, paresseux, voleur, ivrogne, lâche, sournois, faux, menteur
dissimulé, hypocrite, insaisissable, dangereux, pillard, traître, intolérant,
fanatique, cruel, sanguinaire. Point par point, on le voit tout le contraire du
français, dont on explicite les qualités par simple retournement des termes.
Aussi fallait-il que le colonisé soit bête et méchant pour refuser de tels
bienfaits, au point d’en vouloir á ses bienfaiteurs.
Il en a fallu des
armées et des guerres pour ramener la paix dans les territoires occupés par les
armées et la guerre. Il a fallu en distribuer des grains pour compenser
l’incendie des silos et des cultures, les razzias et la colonisation des terres.
Il en a fallu des infirmeries pour soigner les survivants des massacres et des
bombardements. Il en a fallu des écoles pour parvenir à la scolarisation en
français du 10% des enfants musulmans.
Mais, puisque ces
races et cultures ne valaient rien, les liquider au plus vite c’était la seule
chose à faire. Jeanson a ainsi décrit les thèses coloniales:
“Les arabes sont de
grands enfants, avec des tas de défauts; il faut faire leur bonheur malgré eux
et c’est d’ailleurs ce que nous faisons depuis toujours. Mais
Pour les colonies
d’outre-mer il était urgent de répandre un “basic-french”, suffisant pour “ces
peuples qui sont des enfants”, disait l’humaniste Jaurès en 1884 à l’occasion
de sa conférence d’Albi. Après tout, l’Arabe ou le Swahili n’étaient rien
d’autre que les “patois” des colonies africaines, tout comme “l’enfantin
euskera” dont parlait le charlatan espagnol Unamuno.
Mais “que faire avec
des gens qui préfèrent la liberté au pain?” s'exclamaient – encore cinquante
ans plus tard – des pédagogues coloniaux déçus, amers et décontenancés devant
“l’inexplicable résistance” de ces gens-là aux bienfaits de la colonisation
française. C’est l’hommage involontaire que le colonialisme rend aux colonisés.
Parce que, partout dans le monde, malgré l’écrasante supériorité – en armes et
matériel – du Nationalisme-impérialisme-colonialisme, malgré la férocité de la
répression, malgré les révoltes noyées dans le sang, les “Peuples barbares et
les races inférieures” ne se sont jamais soumises, n’ont jamais cessé de lutter
pour leur liberté. Ils ont fait l’honneur du genre humain; ils ont prouvé que,
si on peut dominer, asservir ou exterminer un Peuple par la violence, on ne
peut pas en espérer ni adhésion ni consentement volontaires, on ne peut pas lui
enlever le sens de sa dignité, de son identité, ni son attachement farouche à
sa liberté. Ces “Peuples inférieurs” ont souvent arraché à l’impérialisme leur
droit de libre disposition, c’est à dire l’indépendance. Lutte longue et
pénible toujours; parce que si Suédois ou Anglais peuvent – par sagesse ou par
calcul – “abandonner” des territoires qu’ils ont obtenu et gardé par la
violence, mais qui dépassent leur capacité de gestion, d’ingestion et de
digestion, Français et Espagnols ne le peuvent pas avant d’atteindre la limite
extrême de violence dont ils sont capables.
En 1908 Jaurès
commençait à comprendre. “Il a refusé de voter les crédits supplémentaires
demandés pour les opérations militaires”. Lui, qui avait cru à une “mission
civilisatrice”, il fit à la tribune “son examen de conscience et celui du pays,
suivi de son mea culpa”, a écrit Auclair. Jaurès déclarait à
Pendant qu’il “se
demande”, la guerre continue. Et quand il finit de se demander, aussi. “Notre
diplomatie a éveillé dans l’esprit des Marocains cette impression que nous
voulions attenter à leur indépendance.” Ils étaient vraiment impressionnables,
méfiants, suspicieux et susceptibles, ces Marocains! Tel qu’il le semblait à
Jaurès, par contre, il ne devrait y avoir aucune raison d’inquiétude pour le
Maroc ou la Tunisie. Le “protectorat” d’une nation comme la France : dont
tous les antécédents parlaient d’eux-mêmes, offrait – semble-t-il – toutes
garanties voulues en la matière, des deux côtés de l’Algérie conquise, annexé
et pacifié. Pourtant – on l’a vu – cinq ans auparavant Jaurès avait déjà
dénoncé le “parti militaire et colonial” et la “politique insensé et vraiment
criminelle” qui visait à “envoyer une armée sur le territoire marocain et y
établir par la force le protectorat” de
Et il continuait à
dire : “Les concessionnaires du port de Casablanca n’ont eu aucun égard
aux plus justes susceptibilités des Marocains.” Bien sûr, le bombardement de
Casablanca n’a sans doute pas rassuré ces populations que la diplomatie
française impressionnait et les concessionnaires froissaient. Et il a été suivi
du carnage de
Peu à peu Jaurès
devient plus lucide: “Tous les aventuriers qui ont abusé de la faiblesse et de
la sottise du sultan Abd el Aziz pour le pousser aux dépenses les plus folles
et aux emprunts les plus onéreux; tous les banquiers de proie qui ont exploité
par des prêts usuraires un pays livré par un fantoche à des forbans; les
capitalistes impatients qui se faisaient donner concessions sur concessions et
qui poussaient leurs entreprises sans aucun égard aux droits, aux habitudes,
aux sentiments de tout un Peuple; l’association Krupp-Schneider (le coup
‘amical’ de l’obus allemand et de l’obus français) défonçant un cimetière
musulman pour exploiter une carrière; puis – sous prétexte de châtier les
premières violences et les représailles d’un Peuple marocain exaspéré –
l’odieux bombardement de Casablanca, la mise à feu et à sang de
En 1911 –
l’occupation militaire étant déjà lancée au Maroc – le Gouvernement français et
les services de propagande du corps expéditionnaire essayaient encore de
tromper le Peuple marocain et même les grandes Puissances. “Il ne s’agit pas
d’une occupation mais d’un secours provisoire et urgent.” Mais Jaurès n'est pas
dupe: “Les généraux et les financiers sont en liesse. Des colonnes de soldats
français plus ou moins déguisés en marocains vont marcher sur Fez. Si l’Espagne
réclame on lui fera sa part. Si l’Allemagne demande des compensations on les
lui accordera. Si les marocains se soulèvent on les fusillera et on appellera à
la rescousse les troupes noires qu’on couvrira de louanges, qu’on illuminera de
gloire, et qu’on préparera ainsi à intervenir dans les affaires françaises le
jour où il faudra mâter le peuple souffrant. Voilà le plan où colonialisme et
réaction, piraterie et répression se combinent”.
“Est-ce de Fez que nous allons donner à l’Europe et au monde, dans la nouvelle crise qui peut menacer la paix, des leçons de sagesse, de désintéressement et de respect du droit international hypocritement et cyniquement violé par nous?” “Je dis que parmi tous ces peuples longtemps opprimés ou endormis, ou séparés de l’Europe par des océans d’indifférence; je dis que partout il y a des forces morales neuves qui s’éveillent, un appétit de liberté, un appétit d’indépendance, le sens du droit, qui pour s’affirmer nous emprunte quelquefois nos propres formules.” “Il venait de loin”, commente Ribérioux.
XIV
On trouve sous la
plume et dans les discours de Jaurès la perception de plus en plus aiguë du
capitalisme nationaliste qui se développe et de la catastrophe qui s’approche.
Cependant, sa croissante lucidité ( ?) ne pouvait pas s’appliquer aux
mythes et aux dogmes du Nationalisme impérialiste Français, qui a fanatiquement
établi a priori le fondement “naturel, démocratique, pacifique et non violent”,
et le caractère “humaniste et civilisant” de l’Empire Français. (La position du
National-socialisme espagnol à l’égard de son propre Empire n’a pas été laissée
pour compte dans cette même tâche de falsification.)
Il a tout
naturellement compris cet Empire, sans aucun doute, comme la nation et
civilisation françaises: agents universels du progrès et du bonheur. Pour
quelqu’un qui comme lui est plongé dans le délire social-chauvin, le
Nationalisme impérialiste de son (adopté) pays contre les Peuples et les États
annexés et par annexer est aussi impalpable que l’eau est pour le poisson:
leurs crimes constitutifs sont invisibles pour lui, et leurs dysfonctionnements
sont, tout au plus, des phénomènes naturels défavorables qui se produisent
fatalement. (Ce domaine de la météorologie était appelé à donner un grand jeu,
comme nous le verrons.) C’est précisément ce Nationalisme fanatique et totalitaire:
non reconnu par lui-même, qui l’a finalement détruit. Voyons quelques-uns de
ces moments où il exprime sa perception de la catastrophe à venir.
En 1895 Jaurès
écrit : “L’industrie elle-même est un combat; la guerre devient la première, la
plus excitée, la plus fiévreuse des industries”. “Toujours votre société
violente et chaotique : même quand elle veut la paix, même quand elle est
en état d’apparent repos, porte en elle la guerre comme la nuée dormante porte
l’orage! ”
L’ile de Cuba:
“terre espagnole” selon Jaurès, c’est un premier sujet d’inquiétude en 1898. La
“pacification dans le cadre de la Constitution et du Statut d’autonomie” de la
Restauration, avait abouti à l’échec et au limogeage du général Martínez
Campos. C’était le tour du sanguinaire général Weyler, qui allait établir son
bien mérité prestige par ses crimes en Cuba et après en Catalogne. Il était
chargé de rétablir “l’unité nationale” sur l’île, et il remplit sa mission de
la seule manière que Français et Espagnols connaissent pour combattre la
liberté et la résistance des Peuples.
Au vu des
Nationalistes et impérialistes-colonialistes européens : y compris ceux qui se
sont appelés “socialistes”, les atrocités des forces armées espagnoles, leur
politique de terreur, massacres et terre brulée, les camps de concentration –
dont les horreurs scandalisaient encore les libéraux anglo-saxons – “servaient
de prétexte” aux convoitises américaines ; prétextes facile à vider en ne les
commettant pas. Selon ces agents idéologiques, de telles atrocités étaient
d’autant plus “compréhensibles et excusables” que ces forces militaires
“étaient chez-elles, en terre espagnole”, et qu’elles opéraient sur “des
populations également espagnoles”. Pour la propagande et l'opinion françaises,
les “insurgés” cubains et philippins “aspiraient à la dictature”. Ils étaient
“à peine mieux qu’une bande d’assassins”. Ce qui ne les empêchait pas
d’infliger des pertes terribles à l’économie et aux armées régulières
espagnoles.
Au même moment où
toute “la gauche des grandes nations civilisées”, y compris les
National-socialistes de
La “menace
américaine” servait d’alibi à l’impérialisme européen, qui depuis des siècles
n’était point “une aspiration ou une menace” mais une réalité d’oppression,
d’exploitation, d’esclavage et de destruction des Peuples partout de par le
monde. Inévitablement, les impérialismes anciens ou nouveaux mettaient en
danger l’Empire français. Sous leur poussée, l’impérialisme aux abois devenait
défense du statu quo et “défense nationale contre les annexions”,
c’est-à-dire : défense de l’Empire et des annexions anciennes, contre l’Empire et les
annexions nouvelles, celles des autres. Ceci imposait et annonçait, déjà,
l’alliance espagnole: “Quel pays brulé! Quelle sécheresse tragique! Des grandes
plaines nues, presque sans arbres, avec des blés maigres et rares”. “Il y a
dans cette pauvreté quelque chose de pittoresque et de farouche”, écrivait
Jaurès en 1911. Le ton, les lieux communs et les banalités équivoques ne trompent
pas: le Nationalisme impérialiste espagnol n’était pas à craindre. Voilà au
moins une frontière bien assurée. Voilà, en plus, un allié “naturel” face au
nouveau danger planétaire.
Voici son exposition
de cette réalité: “Par l’annexion des iles Hawaï, par la mainmise directe ou
indirecte sur les Philippines et Cuba, les Etats Unis développent leur
puissance capitaliste et affirment leur puissance militaire.” “Par leurs
rapports avec Cuba, terre espagnole, les voilà en communication et peut-être en
conflit avec toute l’Amérique du Sud. Et comme en même temps l’annexion des
îles Hawaï mécontente et inquiète le Japon, les Etats-Unis vont être obligés de
consolider en une organisation militaire permanente les belles forces d’attaque
qu’ils ont soudain mobilisées. Là comme partout, le capitalisme, nécessairement
agressif et combatif, conduit au militarisme.” “La richesse et la puissance des
Etats-Unis sont un quart de la richesse et de la puissance du monde.” “Les
luttes entre nations prennent les proportions de luttes entre continents.”
“C’est le feu interne du capitalisme qui soulève et heurte les continents.”
“Pour la première fois il y aura une guerre universelle mettant aux prises tous
les continents. L’expansion capitaliste a élargi le champ de bataille: c’est
toute la planète que se disputent maintenant les capitaux, c’est toute la
planète qui sera rougi du sang des hommes!”
“Mais la phrase de
Jaurès, indéfiniment répétée, ‘le capitalisme porte en lui la guerre comme la
nuée l’orage’, ne tient pas lieu de preuve”, selon Aron. Mais Espilondo n’est
pas d’accord avec Jaurès. Parce que si Jaurès a raison, par là même Espilondo –
qui se dit non-anticapitaliste – n’est pas contre mais pour la guerre, ce qu’il
confirme par ailleurs. Il est seulement contre la guerre qui font les autres.
C’est bien le point de vue de Hitler, nous devons être méfiants.
En ce qui concerne
la France, Jaurès ne remarque rien d’autre que “la douloureuse mutilation de la
France” qui était l’Alsace-Lorraine; l’Empire français, bien entendu, n’ayant
jamais mutilé quoi que ce soit.
En 1900 Jaurès
constate “l’impérialisme agressif dont témoignent Anglais et Allemands”. “Une
nervosité aigue semble gagner l’Angleterre.” Les peuples européens sont “livrés
aux pires suggestions de la convoitise et de la haine”. “En Allemagne,
l’empereur semble perdre son sang-froid. Les sauvages conseils d’extermination
qu’il a donnés à ses troupes partant pour
Cependant, et après
les expériences déjà fournies par l’Ancien Régime français et la Révolution, ses actions ultérieures : de l’Empire, la Restauration, la Monarchie de Juillet,
Bien différemment,
le socialiste allemand August Bebel, s’exprimant également en 1900, n’a pas
échappé à ses propres critiques ni ne s’est permis d’utiliser les astuces avec
lesquelles Jaurès a atténué la réalité, au moyen de petites phrases sur “l’ère
des luttes épiques de continent à continent”, ou sur “les fréquentes éclipses
de conscience européenne pour leur participation à la barbarie qu’elle prétend
châtier”. Pour cet auteur, il n’y avait pas d’épopée dans ces performances,
mais seulement la barbarie, et c’était principalement allemand et européen,
comme il l’a dit en parlant au Reichstag: “Non, ce n’est pas une Croisade, pas
d’une guerre sainte; c’est une guerre de conquête très ordinaire... C’est une
campagne de vengeance aussi barbare qu’on ne l’a jamais vue au cours des
derniers siècles, et pas souvent dans l’Histoire... pas même avec les Huns, pas
même avec les Vandales... Il n’y a pas d’équivalent à ce que les troupes
allemandes et d’autres Puissances étrangères, ainsi que les troupes japonaises,
ont fait en Chine.” (Vid. Mombauer, Annika: ‘Wilhelm
II, Waldersee, and the Boxer Rebellion’, dans ‘The Kaiser’. Cambridge University Press, 2003.)
En 1903 Jaurès a
déclaré : “Dans l’état présent du monde ce n’est pas la guerre qui peut être une
solution. Le jour où un pacte décisif de paix sera conclu entre les peuples
européens, le jour où ils se seront donné à eux-mêmes par le désarmement
simultané – vous m’entendez bien – un gage de sécurité réciproque, ce jour-là
tous les groupes humains, de
Une fois de plus,
l’Empire français ne semble pas être visé par les affirmations de Jaurès. Et il
est également évident dans ces mots que les “droits de tous les groupes
humains” dont parlait Jaurès étaient limités à quelques-uns et, en tout état de
cause, conditionnés par la paix entre les Etats, dans le maintien du statu quo.
Ce qui rendait le “socialisme” de Jaurès très marqué à droite : tout
d’abord par rapport au “pacifisme bourgeois” de Wilson, pour qui le droit d’autodétermination
des Peuples était le fondement de la paix mondiale. Et, bien entendu, au
bolchevisme de Lénine, pour qui la paix pouvait seulement être conséquence de
la liberté des nations et de la révolution socialiste, la lutte contre
l’impérialisme devant commencer par la lutte contre l’impérialisme de son
propre pays.
En 1905 Jaurès
s’échauffe : “Si les allemands veulent se battre on se battra!”. En 1909 il
écrivait: “C’est le conflit tantôt sourd, tantôt aigu, toujours profond et
redoutable, de l’Allemagne et de l’Angleterre”. “C’est ce conflit qui pèse sur
nous, c’est lui qui suscite ou qui aggrave tous les autres conflits.” “Pendant
que l’Allemagne et l’Angleterre se contrecarrent publiquement et sournoisement
à travers le monde, voici que les Etats-Unis grandissent et que leur ambition
mondiale s’éveille.” En 1910: “L’Allemagne, avec sa natalité formidable, peut,
avec ses seuls corps actifs, nous submerger et nous envelopper”. En 1911: “Ah,
ils la veulent, cette guerre!”. Lors de son voyage en Amérique, Jaurès a noté
que les passagers “se demandèrent si un cyclone allait s’abattre”.
Et en 1914 : “Nous
avons contre nous, contre la paix, contre la vie des hommes, à l’heure
actuelle, des chances terribles, et contre lesquelles il faudra que les
prolétaires de l’Europe tentent les efforts de solidarité suprême qu’ils
pourront tenter”. “Si l’Autriche envahit le territoire slave, si les Germains,
si la race germanique d’Autriche fait violence à ces Serbes qui sont une partie
du monde slave, il y a à craindre et à prévoir que
Comme on l’a vu,
Jaurès situait “l’agresseur” – “l’impérialisme agressif” – un peu partout et
surtout du côté de la race germanique, avec la race slave pour alternative.
“Nous, socialistes français, notre devoir est simple. Nous n’avons pas à
imposer à notre gouvernement une politique de paix: il la pratique. Moi, qui
n’ai jamais hésité à attirer sur ma tête la haine des chauvins, par ma volonté
obstinée et qui ne faillira jamais du rapprochement franco-allemand, j’ai le
droit de dire qu’à l’heure actuelle le gouvernement français veut la paix et
travaille au maintien de la paix.” Ce point de vue était partagé par Léon
Jouhaux, dont les déclarations à l’occasion des obsèques de Jaurès n’ont pas
été sans conséquences, à la veille de la guerre.
E. Dolléans a
écrit : “Depuis le début du siècle, la paix court de grands risques.”
“Pendant les années 1911, 1912 et 1913 les hommes sentent passer sur leurs
têtes l’ombre immense du cyclone qui approche et dont ils ne mesurent ni
l’étendue ni la durée”. Des théoriciens de gauche et même de droite avaient
souligné le “développement inégal” du capitalisme mondial, qui faisait de la
guerre – impérialiste des deux côtés – la seule issue possible, nécessaire et
même salutaire et souhaitable dont l’affrontement des grandes puissances était
capable. L’affaire Schnæbelé, la guerre hispano-américaine, les crises de Fachoda,
de Tanger et d’Agadir, les guerres balkaniques avaient prévenu les plus
optimistes. Delaisi et Merrheim prévoyaient “la guerre qui vient” et se
préoccupaient “des menaces de guerre qui noircissent l’horizon”. Les Congrès
syndicaux d’Amiens, de Marseille et de Toulouse avaient prévu et annoncé la
guerre, et préparé la riposte des syndicats. En 1911 une conférence syndicale
extraordinaire avait décidé: “Le cas échéant, la déclaration de guerre doit
être pour chaque travailleur le mot d’ordre pour la cessation immédiate du
travail”. “A toute déclaration de guerre les travailleurs doivent sans délai
répondre par la grève générale révolutionnaire.” On ne saurait être plus clair.
Mais, pourtant, en
1914 la grève générale : qui préconisaient les partis et les syndicats de
travailleurs encore quelques jours avant la grande boucherie, n’a jamais été
convoquée ou appliquée devant la mobilisation. “La préparation de la guerre par
le gouvernement était beaucoup mieux menée que l’action contre la menace de
guerre par la direction confédérale, et il la gagnait de vitesse”, écrivait
Rossmer. Une résolution syndicale de 1915 affirmait que la guerre “n’est que le
résultat du choc de tous les impérialismes nationaux qui ont intoxiqué tous les
États grands et petits”. Liebknecht déclarait en 1915: “La guerre actuelle est
une guerre impérialiste mondiale dont on prévoyait depuis longtemps la venue”.
Bebel et Liebknecht avaient honnêtement prévenu que, si la guerre était
déclarée, “la classe ouvrière allemande suivrait comme un seul homme”.
“En présence du raz
de marée qui les emportait, comment parler de la responsabilité des masses
syndicales?” “Devant la fatalité, une immense résignation”, note Dolléans. “Les
émotions nationales et guerrières agissent plus profondément sur l’esprit
humain que les émotions internationales et révolutionnaires”; “La haine dirige
et conduit aveuglément les Peuples vers leur extermination”, disait Halévy.
“Nous avons été impuissants les uns et les autres; la vague a passé, nous a
emportés”, expliquait Monatte. Et Alphonse Merrheim: “Nous étions complètement
désemparés, affolés.” “A ce moment-là la classe ouvrière, soulevée par une
formidable vague de nationalisme, n’aurait pas laissé aux agents de la force
publique le soin de nous fusiller, elle nous aurait fusillé elle-même”. Jaurès
l’avait prévu: “S’il y a la guerre, on nous tuera d’abord; on le regrettera
peut-être après mais il sera trop tard!” “Il faut nous attendre à être
assassinés aux coins de rue.” Lorsqu’il déclarait son intention de “continuer
notre campagne contre la guerre” au sous-secrétaire d’Etat Ferry, celui-ci le
prévenait: “C’est ce que vous n’oserez pas, car vous seriez tué au prochain
coin de rue”. Le soir même c’était fait.
Des militants, dans
“l’angoisse légitime”, “découvrent brusquement l’inanité des méthodes d’action
directe auxquelles jusque-là ils avaient cru”. Les “confédéraux de Jouhaux,
comme
“Parmi les
parlementaires socialistes, un clan non négligeable était hyper-nationaliste”,
a écrit Lavau, qui s’y connait. Les minoritaires socialistes de gauche,
syndicalistes révolutionnaires et anarchistes sont restés minoritaires :
résignés, matés par la répression de toutes les libertés, bâillonnés par la
censure, et terrorisés par le “carnet B”, le camp des suspects, la guillotine
et le poteau d’exécution ; tenus par les sursis d’appel et les commissions
“de santé” pour la récupération des “réformés”, qui étaient envoyés faire du
pacifisme et se refaire effectivement une santé en première ligne de feu ;
brisés par la guerre même, et débordés par le Nationalisme belliciste des
masses populaires, alors qu’ils trouvaient bouchées les conférences et la
correspondance internationales par le refus du courrier et des passeports.
“Il n’y a plus de
droits ouvriers, plus de lois sociales, il n’y a plus que la guerre”, déclarait
Millerand, devenu déjà ministre en 1896 avec l’appui de Jaurès, son compagnon
de parti, avant de devenir ministre de la guerre quasi-inamovible entre 1912 et
1915. Mais les marxistes de Guesde, comme les blanquistes “antipatriotes” et
anti-militaristes d’Hervé, qui étaient auparavant bien plus “intraitables” que
Jaurès sur l’impérialisme, la paix, la guerre et la “défense nationale”, ont
prôné l’Union sacrée dès que la guerre a été déclarée, et sont devenus des
Nationalistes et des bellicistes à outrance. Pourtant Guesde avait prévenu en
1899: “Le jour où le cas Millerand serait devenu un fait général, il faudrait
dire adieu à tout internationalisme et devenir les nationalistes que, ni vous,
ni moi, ne consentirons jamais à être.” (Ne jamais dites “jamais”.)
Selon Lénine, “les
social-chauvins français, qui sont les plus habiles, les plus rompus aux
filouteries parlementaires, ont depuis bien longtemps battu tous les records
dans l’art de prononcer des phrases pacifistes et internationalistes infiniment
grandiloquentes et sonores, tout en trahissant avec un cynisme inouï le
socialisme et l’Internationale, en entrant dans les ministères qui font la
guerre impérialiste, en votant les crédits ou les emprunts”, “en s’opposant à
la lutte révolutionnaire dans leur propre pays” etc. etc. Ces petits bourgeois
“ont conduit le socialisme à cette honte inouïe: justifier et farder la guerre
impérialiste en lui appliquant les notions de ‘défense de la patrie’”.
À la Conférence de
Zimmerwald (1915), Merrheim répondait ainsi à Lénine qui le pressait d’agir:
“Quant à la grève de masses contre la guerre, ah camarade Lénine! Je ne sais
pas même si j’aurais la possibilité de retourner en France et de dire ce qui
s’est passé à Zimmerwald; c’est loin de pouvoir prendre l’engagement de dire au
prolétariat français: Dressez-vous contre la guerre!”.
Malgré les hommages
appuyés – et intéressés – des bolcheviques et les réserves des pacifistes, il
n’y a pas d’illusion à se faire sur le comportement qu’aurait eu Jaurès si les
hyper-nationalistes ne lui avaient ôté toute possibilité de faire quoi que ce
soit. Son souci concernant “l’état de nos mitrailleuses sur la frontière de
l’Est”, quelques jours avant le déclanchement des hostilités, n’était pas en
désaccord avec ses idées d’auparavant, et on ne saurait pas à ce sujet parler
de trahison ou inconséquence, comme pour d’autres pacifistes bien plus loquaces
et intransigeants que lui. La recherche de la paix l’aurait toujours motivé, au
dedans des limites qu’il avait toujours affirmées. Par contre, on ne peut pas
dire sans ombre d’hésitation ce qu’auraient fait à ces moment-là les
représentants Nationalistes de l’actuelle “gauche” Nationaliste d’Anglet. À
entendre ses représentants, dès la première heure ils se seraient tous portés
volontaires pour la première ligne de feu, comme ils auraient tous été
résistants dès 1940.
“En temps de guerre
tout le monde devient nationaliste.” “L’Internationale est faite pour des temps
de paix, elle n’a pas sa place dans des temps de guerre”, disait Kautsky.
“Prolétaires de tous les pays, unissez-vous dans la paix et coupez-vous la
gorge dans la guerre” était – selon le commentaire sarcastique de Luxembourg –
le nouvel mot d’ordre de l’Internationale socialiste. Il était en
correspondance à celui de l’Eglise romaine: “Chrétiens, aimez-vous les uns les
autres dans la paix et égorgez-vous les uns les autres dans la guerre”. Ce que
d’un côté comme de l’autre on a fait consciencieusement, sous les louanges et
les bénédictions des respectives hiérarchies nationales.
La littérature en
langue basque s’est enrichie par la même occasion de nouveaux textes devenus
classiques, comme les sermons et les articles de Hiriarte-Urruti, Barbier et
Anxuberro, poussant les jeunes indigènes à tuer et se faire tuer pour défendre
la vraie religion et l’Empire français contre les hérétiques et les autres
Nationalismes. Peu importaient alors l’origine, la langue, la religion ou les
motivations, pourvu que la chair à canon soit prête à l’emploi au point nommé.
Comme le dit Espilondo : “Pourquoi pas, si c’est pour bien faire”.
Comme le disait encore Lénine: “La bourgeoisie française a inculqué aux soldats de ses colonies que les noirs devaient défendre la France”. “La France a appelée sous les armes des millions de nègres pour combattre les Allemands. On a formé des groupes de choc et on les lançait dans les secteurs les plus dangereux où les mitrailleuses les fauchaient comme de l’herbe.” Le génocide des Peuples subjugués des colonies françaises se poursuivait par mitrailleuses allemandes interposées.
XV
Même si on fait la
part de la rhétorique imagée et des effets de style de Jaurès et des autres, on
peut se demander ce que cache ou révèle l’inflation météorologique qui recouvre
de plus en plus le vocabulaire politique quand la guerre approche :
“Nuée dormante qui
porte l’orage, nuée de l’orage qui est déjà sur nous, ciels où les nuages
d’orage se bousculent, foudres de la guerre qui menacent dans les nuées,
atmosphère de foudre, horizons qui noircissent, point à l’horizon, fréquentes
éclipses, dernière éclaircie avant le sanglant orage, vents soufflant sur le
monde, cyclone à l’ombre immense, cyclone qui va s’abattre, écume qui va
allégrement vers les rivages, formidables vagues, lames déferlantes comme lames
de fond, raz de marée (tempête), horrible tourmente”... apparemment, l’analyse
politique avait bel et bien récupéré les informations météorologiques avec
horaires des marées et prévision du temps. Tout ça avec la forêt épineuse et
sauvage (en prime pour l’histoire naturelle) où rôdent, depuis des siècles, des
bêtes de proie; et (pour ce qui est de l’astronomie) avec des éclipses à
répétition etc. (Où se situe la politique en tout ça ?)
En tout cas aucune
doute n’est pas permis: cette piraterie et cette répression; ces bourgeois,
possédants grands et petits, flibustiers, journalistes de proie, banquiers
d’audace et capitalistes cyniques; cette forêt épineuse et sauvage où rôdent
depuis des siècles des bêtes de proie; ces rêves d’expéditions fructueuses, ce
pillage et cette barbarie dont ne se privent pas les représentants de la
civilisation européenne; cette écume des hautes classes capitalistes qui va
allégrement vers les rivages marocains, ces banquiers de proie qui ont exploité
par des prêts usuraires un pays livré par des fantoches à des forbans, et ces
capitalistes impatients qui se faisaient donner concession sur concession et
qui poussaient leur entreprises sans aucun égard aux droits, aux habitudes et
aux sentiments de tout un Peuple; ces protectorats établis par la force qui ont
laissé des souvenirs abhorrés, des souvenirs de sang et des souvenirs de
violence; cette politique militariste, funeste, insensée et vraiment criminelle
où se combinent colonialisme et réaction; ces leçons qu’on prétend donner de
sagesse, de désintéressement et de respect du droit international hypocritement
et cyniquement violé par nous; ce nationalisme qui essaie d’assourdir et de
stupéfier le cerveau populaire au profit de la réaction, qui ameute contre
l’Allemagne les passions de la rue et le patriotisme tapageur, et qui exclue
Lohengrin de tout répertoire; ce nationalisme fanfaron qui substitue
l’Allemagne par l’Angleterre par un tour de passe-passe et qui atteste des
haines chauvines, et ces émotion nationalistes et guerrières qui agissent plus
profondément sur l’esprit humain que les émotions internationales et
révolutionnaires; cette formidable crise nationaliste qui soulève la classe
ouvrière, qui a assassiné Jaurès et aurait fusillé tout autre qui aurait
résisté; ce mauvais nuage qui était sur le monde ouvrier, ce raz de marée et
cette formidable vague qui passent, qui désemparent et affolent les plus hauts
responsables et emportent le syndicalisme; cette vague déferlante comme une
lame de fond; ce vent nationaliste qui souffle sur le monde, qui arrête dans sa
marche le prolétariat international, qui entraîne à la dérive une partie même
de la classe ouvrière jusqu´à faire le jeu de l’ennemi; cette ombre immense du
cyclone qui approche et dont on ne mesure ni l’étendue ni la durée; cette
dernière éclaircie avant le sanglant orage; ces Peuples qui se sentent dans une
atmosphère de foudre; ces foudres de la guerre qui menacent dans les nuées;
cette société industrielle qui même en état d’apparent repos porte en elle la
guerre comme la nuée dormante porte l’orage; ces menaces de guerre qui
noircissent l’horizon; et – enfin – cette guerre impérialiste mondiale, dont on
prévoyait depuis longtemps la venue et qui est le résultat du choc de tous les
impérialismes nationaux qui ont intoxiqué tous les États grands et petits, tout
ça est : dans les textes et les contextes de Jaurès, le nationalisme
français, c’est le capitalisme et la bourgeoisie françaises en concurrence avec
les autres grandes puissances pour la domination et la suprématie mondiales.
Mais voici que la
nouvelle exégèse qui propose et impose Espilondo diffère sensiblement de cette
interprétation. Selon Espilondo, le nationalisme dont parlait Jaurès, le
nationalisme qui menace et viole la paix, la liberté et l’ordre international,
n’est pas celui de l’Impérialisme français, anglais, allemand ou américain qui
a ensanglanté sans cesse l’Europe et le monde, c’est celui des basques. Cette
société industrielle : qui même en état d’apparent repos porte en elle la
guerre comme la nuée dormante porte l’orage, c’est celle des basques. Ce
nationalisme est la peste de la bourgeoisie basque.
Dans des cas
semblables on peut hésiter entre trois hypothèses. Ou bien Espilondo n’a pas lu
– même de très loin – Jaurès, mais prétend qu’il l’a fait pour tromper les
victimes de son bavardage. Ou bien il l’a lu, mais il n’a rien compris et
fausse les idées de Jaurès. Ou bien il l’a lu et il l’a compris, mais il est un
menteur et un faussaire. Quoi qu’il en soit, il ment ou fausse les idées dont
il se réclame, en se servant de son prophète Jaurès pour assouvir et servir sa
haine du Peuple Basque. Par là même il se disqualifie moralement, et il
disqualifie encore le mouvement qui en fait son porte-parole. “J'ai toujours
fait le choix de la fidélité aux valeurs démocratiques, du contact permanent
avec le terrain et du parler vrai. Dans la clarté, toujours dans la clarté. La
vie politique doit être claire. Je refuse le double langage. C'est aussi faire
le choix d'une certaine éthique politique.” Elles sont belles les valeurs démocratiques,
elle est belle l’éthique politique, il est clair et vrai le parler et fiable la
fidélité auprès d’Espilondo !
Espilondo est un menteur ou un faussaire. De lui on peut dire ce que dit Roccard au sujet de Mitterrand: “Il n’était pas un honnête homme”. Et Jaurès: “Je vous dis à vous tous, républicains: souvenez-vous que dans notre histoire il y a deux forces indivisibles, deux mots synonymes: contre-révolution et calomnie!” Et Marx: “Un homme qui essaie d’accommoder la science à une position qui ne dérive pas de son intérêt propre – pour erroné qu’il soit – mais d’intérêts extérieurs, aliens et étrangers, je dis qu'il est un homme vil, je l’appelle vil”. Bien entendu, ni Jaurès ni Espilondo ne sont pas des marxistes.
XVI
Le PcF, membre de la
Troisième Internationale après le Congrès de Tours (1920), n’y a rien changé.
Et pourtant, au V Congrès Roy disait : “Il est admis (et le deuxième
Congrès de l’International Communiste l’a assez clarifié) que l’Internationale
communiste reconnait la nécessité historique de proclamer le droit des
nationalités opprimées à la libre disposition”.
Au IV Congrès,
Safarov notait que “Ces camarades du parti français [...] ne sont pas des
camarades mais des petits-bourgeois”. “Ces soi-disant communistes […]
protestent contre l’appel de l’Internationale communiste aux colonies
françaises.” “Il ne s’agit pas d’anthropophagie, il s’agit simplement de la
question nationale et coloniale.” “Sous le drapeau du communisme se cachent des
idées chauvines étrangères et hostiles à l’internationalisme prolétarien.” Ce
qui – a-t-il dit – était revenir aux “conceptions de
Et Manuilskij notait
au V Congrès: “Il y a environ un an le Komintern a lancé un appel aux esclaves
coloniaux, les appelant à se soulever contre leur maîtres. Quand cet appel et
arrivé à une section du P.C.F. en Algérie – celle de Sidi-Bel-Abbès – cette
section a pris une résolution condamnant un tel appel du Komintern à des gens
d’une autre race, exploités par l’impérialisme français”. “A-t-on exclu du
parti ces hommes qui sont peut-être de bons français, mais de fort mauvais
communistes?” “Où sont les documents où le PC français affirme le mot d’ordre
de la séparation des colonies?”. “Vous avez à l’heure présente 800,000
travailleurs indigènes en France. Je demande: qu’avez-vous fait pour organiser
ces ouvriers, pour les préparer à être des cadres d’agitateurs révolutionnaires
dans les colonies? Votre armée compte 250,000 soldats noirs. Croyez-vous que
vous pourrez faire une révolution sociale si demain ces 250,000 se trouvent de
l’autre côté de la barricade?” “Lors du Congrès de Lyon le Komintern avait
adressé un appel aux ouvriers français et aux Peuples coloniaux.” “L’Humanité,
en publiant cet appel, a préalablement séparé du texte les mots ‘et aux Peuples
coloniaux’.”
Pour ce qui est du
“compte-rendu analytique” du V Congrès (publié par
Les “communistes”
français affirmaient, en effet, que le principe de libre disposition était
applicable pour certaines colonies (anglaises, évidemment); mais qu’“une
souveraineté d’anthropophages n’est pas désirable” :
“Il y a des Peuples
en tutelle qui sont dès maintenant capables de se gouverner seuls, et d’autres
qui ne le sont pas encore; et si le devoir communiste commande de donner la
liberté aux premiers, il commande plus impérieusement encore de ne pas
abandonner les seconds à leur misérable sort, il commande fortement de leur
servir de précepteurs humains et désintéressés”, “dans l’intérêt même des populations
malheureuses de l’Afrique du Nord, de
Voilà le parti qui lance des accusations de xénophobie à l'encontre des démocrates basques. On croirait entendre la clique “communiste” d’Anglet. Nous savons où tout ça nous a conduit, quelle répression et quelles crimes atroces ont été mis en œuvre par le gouvernement “de gauche” à l'encontre des Peuples subjugués, pour la défense de la civilisation et la révolution National-socialiste et National-communiste françaises.
Un peu plus tard, le Français Nationaliste Thorez a donné sa position sur le Mouvement de libération des peuples coloniaux dans le rapport d’ouverture au Congrès du Parti communiste Français, avec une mystification de la pensée de Lénine inclue : “Au Liban et en Syrie, la France ne peut continuer à favoriser [un nationalisme arabe mené par] les agissements des fascistes, agents de Mussolini, ennemi de la France du Front populaire, qui font régner la terreur sur un peuple qui veut vivre en amitié avec la France. La revendication fondamentale de notre Parti communiste concernant les peuples coloniaux reste la libre disposition, le droit à l’indépendance. Rappelant une formule de Lénine, nous avons déjà dit aux camarades tunisiens, qui nous ont approuvés, que le droit au divorce ne signifiait pas l’obligation de divorcer. Si la question décisive du moment c’est la lutte victorieuse contre le fascisme, l’intérêt des peuples coloniaux est dans leur union avec le peuple de France, et non dans une attitude qui pourrait favoriser les entreprises du fascisme et placer par exemple l’Algérie, la Tunisie et le Maroc sous le joug de Mussolini ou d’Hitler, ou faire de l’Indochine une base d’opération pour le Japon militariste.” (Maurice Thorez ; IX Congrès du Parti communiste français, Arles, Décembre-1937.)
“Nous avons dit et nous répétons : ‘Unir tous les hommes qui veulent vivre libres, sans distinction de races ni de religions: tous les Français de France et tous les Français d’Algérie. Quand je dis ‘Français d’Algérie’ je vous entends tous ici présents, vous les Français d’origine, les Français naturalisés, les israélites, et vous aussi les musulmans arabes et berbères, tous les fils, sinon par le sang, du moins par le cœur de la grande Révolution française qui ne faisait aucune distinction entre les races et les religions quand elle affirmait que la République française était une et indivisible’.” (M. Thorez, Œuvres choisies (2). 1938-1950.)
Or, pour que
quelques-uns ne soient pas ses fils par le sang, il faut bien qu’il y en ait
d’autres qui sont des fils par le sang d’une République française que – on nous
dit – est distincte par ce sang, dont la formule ne nous est pas communiquée.
Et en outre, si la République française est toujours une e indivisible, alors
il n’y a pas de place pour le droit de libre disposition de tous les Peuples,
qui sont niés en théorie et en pratique par le Nationalisme impérialiste et
chauvin français.
Et il continue à
dire: “Où est maintenant dans votre pays la race élue [...]. Tous ceux-là se
sont mêlés sur votre terre d’Algérie, auxquels se sont ajoutés des Grecs, des
Maltais, des Espagnols, des Italiens et des Français, et quels Français! Les
Français de toutes nos provinces, mais en particulier les Français des terres
françaises de Corse et de Savoie, et ceux de la terre française d’Alsace, venus
en 1871 pour ne pas être Prussiens.” “Notre cause: la cause de la liberté; la
cause de
Cependant, on voit
que, s’ils “s’étaient mêlés” in Algérie, il n’y avait plus de Berbères, Arabes
etc. mais seulement “de descendants et de fils” de ces gens-là, tous devenus
Français en toute liberté. Les Français “d’origine”, par contre, sont des
Français ‘per se’, et non seulement de “descendants et fils” de ces
gens-là, puisque de tous ces personnes de différents origines seulement eux restent
ce qu’ils étaient. Pour les autres, l’union “avec” le peuple de France est en
réalité l’incorporation “au” peuple de France qui existait déjà auparavant.
Ce n’est pas la pluralité des Français et des autres en tant que Peuples différents, c’est la “pluralité” de toutes origines mais tous devenus Français, puisque les peuples d’autres origines n’existent plus car ils ont cessé d’être ce qu’ilsétaient pourdevenir Français.C’est grand, c’est généreux la France du PcF, prête à civiliser-franciser le monde entier! Il suffit pour cela d’exclure le “nationalisme excluant” (grec, maltais, espagnol, italien, prussien, anglais, américain, japonais, vietnamien, algérien, numide, berbère, carthaginois, romain, arabe, turc et, bien entendu, breton, corse ou basque; bref : celui de tous les autres) au profit du seul “non-nationalisme anti-nationaliste incluant” (français), toujours réaffirmé de manière obsessionnelle :“Français des terres Français de Corse et de Savoie, celles des terres Français d’Alsace”. Mais en même temps, “la revendication fondamentale de notre Parti communiste concernant les peuples coloniaux reste la libre disposition, le droit à l’indépendance”. Sans aucun doute, cela reste encore le ‘droit de libre disposition des Peuples’ incorporé au nationalisme français “de gauche”.
Le paradigmatique cas algérien. “La simplicité apparente de l’enjeu – indépendance ou non – dissimule la complexité de la situation. Si l’indépendance du protectorat ou de la colonie était considérée par l’Etat impérial comme un mal ‘absolu’, une défaite irrémédiable, on reviendrait à la dualité élémentaire ami-ennemi. Le nationaliste – tunisien, marocaine, algérien – serait l’ennemie, non pas ‘occasionnel’ ni même ‘permanent’, pour reprendre les termes que nous avons définis plus haut, il serait l’ennemi ‘absolu’, celui avec lequel aucune réconciliation n’est possible, dont l’existence même est une agression et que, par conséquent, si l’on allait jusqu’au but de la logique, on devrait exterminer. ‘Delenda est Carthago’: la formule est celle de l’inimitié absolue, l’inimitié de Rome et de Carthage; l’une des deux cités est de trop. Si l’Algérie ‘doit’ demeurer ‘définitivement’ française, les nationalistes qui veulent une Algérie indépendante doivent être éliminés impitoyablement. Pour que des millions de musulmans deviennent français, au milieu du XXe siècle, il faut qu’ils ne puissent même plus rêver de nation algérienne et oublient les témoins ‘qui se firent égorger’.” Etc. (Raymond Aron; ‘Paix et guerre entre les nations’, 1962.)
Mais celà semble bien être aussi la position de principe de Jaurès, même si les applications théoriques concrètes et le passage à l’acte en illustrent les limites.
XVII
Selon Yves Person, “Le peuple français paraît avoir eu de tout temps un certain mal à définir son
identité et s’accepter en tant que tel. Il y a remédié par une fuite constante
vers un universalisme qu’il a décidé d’ailleurs de réduire à lui-même.” “La
volonté du génocide culturel paraît marquer les peuples latins et parmi
ceux-ci, tout en tête la France.” “La puissance du génocide français repose
avant tout sur le mythe de l’universalité de la culture française.” “Ils
s’étonnent donc que le monde entier ne se rallie pas de bon gré et connaissent
des crises de rage névrotique quand ils se heurtent à une langue plus forte,
comme l’anglais. Le drame est que ce mythe meurtrier a été accepté sans aucune
critique et diffusé avec une efficacité redoutable par nos Ecoles Normales.
Bien que se croyant souvent de gauche, la masse de nos instituteurs adhère
toujours au travestissement en universalisme des prétentions nationalistes des
Français.” Ils “ont travaillé à détruire les solidarités collectives, et avec
elles les cultures nationales des colonies.” Ils ont formé ainsi, dans les
Peuples dominés par la France, “une bourgeoisie déracinée bien décidée à se
consacrer” “à la destruction de ses propres valeurs nationales, qu’on lui avait
appris à mépriser”. (Yves Person, ‘Impérialisme linguistique et colonialisme’;
Les Temps modernes.)
Les Français ne
peuvent voir dans les autres que des êtres inférieurs, susceptibles au plus
d’être refaits à l’image des Français. Pour ce pays prétendument modèle,
arrogant et prétentieux, même sa langue est “la plus logique” et sera la langue
universelle. La répétition infernale de mythes constamment encouragés dans
cette “Île des Pingouins”, entraînée par son Nationalisme impérialiste et
chauvin, exclut toute révision critique qui pourrait mettre en question les
dogmes établis.
L'idéologie
nationaliste pose immédiatement l'identité romantique, dogmatique,
essentialiste, constructiviste et mystique de
C’est là ce qu’ils
veulent “au fond” (très au fond) d’eux-mêmes. Parce que, qui ne voudrait pas appartenir au
Peuple supérieur qui va devenir maitre matériel et spirituel du monde et qui un
jour, malheureusement éloigné, se confondra avec le genre humain? Comme l'a
écrit Domenach, malgré les moyens “parfois atroces” qui ont servi à les réduire,
“les nationalités conquises par
L’ignorance et le
mépris des autres, corrélativement, sont fondement idéologique de
l’Impérialisme. Pour le Nationalisme dominant, les nations qu’il réduit ou
qu’il veut réduire à sa merci ne valent rien. Leur race est inférieure ou
dégénérée; leur économie, misérable; leur histoire, inexistante; leur
territoire, terre sans maître; leur “politique”, tyrannie ou anarchie; leurs
mœurs, immorales, dégradantes et cruelles; leur “culture”, triviale, enfantine
et pernicieuse; leurs “langues”, des jargons, des patois, des baragouins, des
sabirs, des charabias et des dialectes (sans langue). Ce ne sont pas des
Peuples ou des Nations, ce qui exclut tout droit de libre disposition; celui-ci
appartenant seulement aux vrais Peuples, aux Peuples nobles, forts, complets,
achevés et adultes, capables d’histoire et de civilisation. On ne saurait
abandonner ces peuplades et ces tribus à leur triste condition mais les tirer
de là (si nécessaire par la force), les soumettre, leur donner la place qui
leur correspond dans la civilisation et, si possible, les liquider pour y
installer la race supérieure. D’ailleurs, faibles de corps et d’esprit comme
elles le sont, dépourvues de raison et de volonté, elles ne sauraient trouver
les forces et la volonté nécessaires pour poursuivre la folie d’une résistance
sérieuse et prolongée, qu’on pourrait mâter par quelques expéditions
pacificatrices ou quelques massacres correctement menés, consolidés par une
occupation militaire et civile bien organisée.
A vrai dire, les
peuplades conquises ont vite fait de comprendre où est leur intérêt, et elles
demandent elles-mêmes d’être occupées et colonisées. Il serait inconcevable
qu’elles puissent refuser longtemps la chance qui leur est offerte; qu’elles
puissent refuser l’apport de la civilisation et du progrès que les Peuples
supérieurs répandent dans leur expansion de par le monde. Dans leur immense
majorités les aborigènes sont soumis, loyaux et reconnaissants; à l’exception
toutefois de quelques malfaiteurs irréductibles, manipulés de surcroît par
l’étranger, qui essaient de prendre la place des Français. Pour les
Nationalistes français les Peuples vaincus ne valaient de toute façon pas
grand-chose, et devenir Français c'était le mieux qui pouvait leur arriver.
Étant données toutes ces conneries idéologiques auxquelles les Nationalistes
françaises croient fermement, que la réalité vienne démentir les préjugés; que
la résistance de fait vienne assombrir ce tableau idyllique, et la fureur
Nationaliste-impérialiste sera à la mesure de la déconvenue.
Voici quelques
exemples de la littérature socialiste qui montrent Nationalisme français. Selon
Engels :
“Ces gens
[françaises] exigent maintenant, parce que les victoires allemandes leur ont
fait cadeau d’une république (et quelle république!), que les Allemands
quittent immédiatement le sol sacré de
“En générale, un
mouvement international de prolétariat n’est possible qu’entre nations
indépendantes. Le peu d’internationalisme républicain entre 1830 et 1848 se
groupa autour de
“Aussi à
l’International, les Français ont considéré ce point de vue comme clairement
évident. Seuls les événements historiques pourraient leur enseigner – et
plusieurs autres aussi – et ils devraient même l’apprendre quotidiennement, que
la coopération internationale n’est possible qu’entre les ‘égaux’, et
même un ‘primus inter pares’ peut exister au mieux pour une action immédiate.
“Par conséquent,
tant que la Pologne reste divisée et subjuguée [comme c’est le Royaume de
Nabarra], il ne peut y avoir de développement ni d’un puissant parti socialiste
au sein même du pays, ni de véritables rapports internationaux [...]. Les socialistes
polonais qui ne parviennent pas à mettre la libération du pays au premier plan
de leur programme me rappellent les socialistes allemands qui étaient réticents
à exiger l’abrogation immédiate de la loi anti-socialiste, ainsi que la liberté
d’association, de réunion et de presse. Pour pouvoir se battre, vous devez
d’abord avoir du terrain, de la lumière, de l’air et de la liberté d’action.
Sinon, vous n’allez jamais plus loin qu’un bavardage” (D’une lettre a Kautsky,
1882.)
Marx écrit à Engels
sur la ‘clique proudhoniste’ à Paris, qui:
“[...] déclare que
les nationalités comme une absurdité, [et] attaque Bismarck et Garibaldi. En
tant que polémiques contre le chauvinisme, leurs actions sont utiles et
explicables. Mais en tant que croyants en Proudhon (auxquels appartiennent
aussi mes bons amis d’ici, Lafargue et Longuet), qui pensent que toute l’Europe
devrait et voudra rester paisiblement assise sur leur postérieur en attendant
que les chevaliers de la France aient aboli la pauvreté et l’ignorance – ils
sont ridicules”. (Lettre du 7 juin 1866.)
“Hier – écrit Marx
le 20 juin 1866 – il y a eu discussion au Conseil de l'Internationale sur la
guerre en cours. [...] Les débats, comme il fallait s’y attendre, se sont
concentrés sur la question des ‘nationalités’ et de notre attitude à son égard.
[...] Les représentants de la ‘jeune France’ (pas ouvriers) mirent en avant ce
point de vue que toute nationalité et la nation elle-même sont des préjugés
surannés. [...] Le monde entier doit attendre que les Français soient mûrs pour
réaliser la révolution sociale. [...] Les Anglais ont bien ri lorsque j’ai
commencé mon discours en disant que notre ami Lafargue et les autres
abolisseurs des nationalités s’adressent à nous en Français, c’est à dire en
une langue incompréhensible aux neuf dixièmes de l’assemblée. Ensuite j’ai
donné à entendre que, sans s’en rendre compte lui-même, Lafargue comprend,
semble-t-il, par négation des nationalités leur absorption par la nation
française, considérée comme un modèle.” (Cité par Lénine ; ‘Du droit des
nations à disposer d’elles-mêmes’.)
De l'avis de
Rivarol, “La langue française est la langue universelle”. Selon Druon “il
semble qu’aucune autre langue n'a suscité autant d’amour, de ferveur,
d'adhésion et d'abnégation à son égard”. “C'est la plus belle langue du monde”,
affirmait le charlatan, flagorneur et philologue Zitrone devant un approbateur,
unanime et ravi parterre d'esthètes et linguistes, réunis “dans le plus beau
pays du monde, dans la plus belle ville du monde et aux abords de la plus belle
avenue du monde” – selon les Français. Les Français “avouent qu’ils ne sont pas
doués pour les langues”. Mais les aveux des Français cachent toujours la
croyance à une intelligence supérieure. En effet, pourquoi apprendre ?:
“En attendant le jour heureux où le monde entier parlera français”, disait
Zola. Mais les Français ne se contentent pas d’attendre.
Ce qui caractérise
le plus le Nationalisme français n’est pas toutefois la conviction de la
supériorité de sa race, de sa langue ou de sa culture. Cette conviction c’est
la banalité même des “grands” pays de ce monde, et de pas mal de petits. Ils se
croient tous supérieurs aux autres, ils réclament les droits particuliers qui
correspondent à cette supériorité, ils sont décontenancés en constatant que
d'aucuns ne partagent pas cette persuasion, et ils sont alors portés à prendre
les mesures “défensives et de stricte justice” qui s’imposent pour remédier à
l'intolérable état de choses qui en résulte.
Alors, ce qui
caractérise les Nationalistes français, et fait d’eux un cas unique dans
l’histoire de l’Humanité, ce n’est pas qu’ils se croient supérieurs, c’est
qu’ils croient que les autres le croient. Le Nationaliste anglo-saxon
s’inquiète d’être “respecté sans pour autant être aimé”. Le Nationaliste
espagnol maudit
Trop imbus de la supériorité qu’ils s’attribuent eux-mêmes, pour s’apercevoir détestés, les Français ne peuvent concevoir que le monde entier ne les admire, les envie et les aime, même les Pays conquis et colonisés. Ils sont incapables de comprendre qu’il puisse exister des gens normaux qui ne veulent pas être ou devenir Français; c’est pourquoi sont-ils incapables de prévoir et de “préparer” les mouvements de libération nationale, traités toujours par la violence à outrance. Ils ont pour les Espagnols les mêmes sentiments et le même mépris que les Allemands ont pour les Français, les Gitans et autres, mais ils croient en plus qu’ils sont aimés par les Espagnols. Ils ont pour ceux-ci “la condescendance, la sympathie, la gentillesse, l’affection et l’admiration amusée” que les seigneurs, les maîtres et les colonialistes ont toujours montré envers leurs inférieurs, les serves, les esclaves et les colonisés.
XVIII
France : le
Royaume-Empire-République français, fait référence au primitif Peuple et
Royaume des Francs, accru par des successives “acquisitions, annexions, unions,
réunions et adhésions” qui furent le résultat des continues guerres
d’agression, expansion et conquête contre tous les petits États environnants du
Continent et des îles adjacentes, en plus de leur annexions d’Outre-Mer; tout
ce qu’il fonda son Empire : l’État “de France et de Navarre” jusqu’en 1830,
dans lequel ‘universel et français’ s’identifient. Dans lui, la guerre et la
terreur ont défait toute opposition stratégique. Le monopole de la violence et
de la terreur est devenu absolu. Par conséquent, le Gouvernement français fait
face à tous les problèmes : politiques ou individuels, par un recours immédiat,
sans contemplation, limites ou palliatifs, à la répression armée. Cette
procédure a échoué à plusieurs reprises au cours du siècle précédent, mais il
continue de s’appliquer, car elle est la seule qui répond à la nature du
régime.
Comme c’est le cas
en général pour les entreprises d'agression et domination contre la liberté des
Peuples et l'intégrité et l'indépendance des États, il n'y a pas de problème
théorique ou scientifique pour établir la nature historique et sociologique de
la subjugation impérialiste au Pays Basque. Ce Peuple, à la personnalité bien
plus ancienne et caractérisé que celle de ses voraces voisins, a manifesté dans
toute son existence le souci constant de sa liberté. “Une indépendance farouche
avait toujours été la caractéristique des Basques depuis leur apparition dans
l'histoire”, reconnaît Atkinson. C'était plus que ce que le despotisme
asiatique espagnol, l'absolutisme français et le totalitarisme pontifical
pouvaient tolérer. C'est par la violence la plus déterminée que cette liberté
leur a été enlevée par ces nouveaux venus qui ne supportaient et qui ne
supportent pas la liberté pour eux-mêmes, moins encore pour les autres.
Pour ces Nations
prédatrices, il faut que le Peuple Basque disparaisse au plus tôt et par tous
les moyens. Cette existence étant maudit, il faut même qu'il est déjà disparu
idéologiquement, il faut encore qu'il n'ait jamais existé pour que
Cacher et fausser la
réalité est objectif normal de toute idéologie totalitaire. Pour liquider les
Peuples il faut bien liquider leur mémoire historique et toute connaissance
d'eux-mêmes. Jour après jour, pendant des dizaines et des centaines d'années,
les monopoles de propagande et endoctrinement, les “Services Publics” et
“l'Education Nationale” : depuis la maternelle à l’âge adulte, et á l'abri
de toute contestation et de tout recours critique, fabriquent la conscience
politique des populations assujetties. Il serait évidemment impossible de
répertorier la somme incalculable de mensonges et contresens qu'une idéologie
de cette acabit a pu véhiculer à ces populations, occupant tout l’espace
idéologique de façon á empêcher toute opposition de se manifester. L'Etat
totalitaire est posé par la violence idéologique dans l’idée, après avoir été
préparé et imposé par les armes dans le fait.
Lorsque Louis XIV de
France et III de Navarre, au sommet de son pouvoir, ordonnait détruire – ou
recopier “en faisant des coupes” – les archives concernant les soulèvements
paysans du “Grand Siècle” et leur impitoyable répression, il fabriquait ainsi
l'historiographie officielle dont Pórshnev dénonce la téléologie et la
rétrojection au service du mythe hégémonique de la grande bourgeoisie française
sous
Ayant épuisé les ressources
du droit divin, naturel, historique ou autres pour justifier sa domination,
l’idéologie de l’impérialisme nationaliste français-espagnol pose, en premier,
le concept “moderne” de la “nation”, et le fondement “démocratique et
non-violent” du régime ainsi constitué. Ces “faits”, ces notions et ces valeurs
se constituent de façon irrationnelle, prélogique et paralogique. Pour son
idéologie Nationaliste, “la Nation” française est Dieu ; et L’Etat
français est son prophète. Droit, morale et tout pouvoir viennent de Lui. Hors
de lui, pas de salut.
La “démonstration” est établie, dans le meilleur des cas, en prenant appui sur ce qu'on prétend prouver. D'ailleurs à quoi bon démontrer? On démontre ce dont on peut douter; mais qui pourrait mettre en doute l'évidence, c’est-à-dire: l'ensemble de dogmes, mythes, croyances, postulats et axiomes construits et véhiculés par le pouvoir total? “La République une et indivisible par pétition de principe”, dont parlait Larzac, ne vaut plus que le mythe de “la Nation”; mais elle a aussi bien tenu à l'usage.
La présence effective du pouvoir politique
institutionnalisé et ses “évidences” : les images, les complexes, les intuitions
et les émotions, les symboles, l'habitude, les préjugés et le conditionnement
des masses, séculairement imposées par la violence à outrance et par les
monopoles de propagande sur une population terrifiée, suffisent pour rendre
tout cela opérationnel. (Leur identité mystique et essentialiste est de plus en
plus dépourvue d'histoire et de sociologie avouable.)
La carte-fétiche sur
le mur de l'école a plus fait, pour fonder la “conscience nationale” depuis
l'enfance, que toute connaissance concrète ou abstraite. C'est pour empêcher
que la “représentation” (compacte, malgré la morsure portugaise, et toute en
jaune) de l'empire espagnol soit “démembrée”, que le Général Franco a déclenché
la grande boucherie des Peuples réels et organisé le régime terroriste et
totalitaire qui est devenu leur prison. C'est pour que la “représentation”
hexagonale et toute en rose de l'empire français continue à intoxiquer les
consciences que le Nationalisme français écrase les Peuples et exalte comme des
faits glorieux et héros les crimes et les criminels qui l’ont fondé.
Il serait illusoire
de croire que le simple rappel des faits historiques ou sociologiques pourrait
changer grand-chose. Des fois, des théoriciens nationalistes ont eux-mêmes pris
conscience de la nature et les horreurs des conquêtes, et des conséquences
matérielles et morales du totalitarisme et l'expansion français sur les autres
Peuples, sur sa culture et civilisation. Simone Weil a bien perçu la cruauté et
les atrocités proverbiales des forces armées du Royaume de France;
Le peuple français
est passé du féodalisme à l’absolutisme “brutalement forcé par la corruption et
par l’utilisation d’une atroce cruauté”. Pendant tout cette période, “il fut
regardé par les autres Européens comme le Peuple esclave par excellence, le
Peuple qui était à la merci de son souverain comme un bétail”. “Pendant la
Fronde et sous Mazarine, la France, malgré la détresse publique, a respiré
moralement. Louis XIV l’a trouvée pleine des génies brillants qu’il a reconnus
et encouragés. Mais en même temps il a continué, avec un degré d’intensité bien
plus élevé, la politique de Richelieu. Il a ainsi réduit la France, en très peu
de temps, à un état moralement désertique, sans parler d’une atroce misère
matérielle.” (Simone Weil; ‘L’Enracinement: prélude à une déclaration des devoirs envers l’être humain’, 1949.)
“Les Peuples
résistent désespérément à la conquête.” Elle a dégagé le rapport entre les
conquêtes et la corruption, ainsi que la répression atroce au sein de ce
Royaume absolutiste. Elle a perçu la terreur, la faim, les massacres, la
déculturation, l'ennui, la morne uniformité, l’humiliation causées par cet
État. Elle a reconnu cet Etat “qui est identiquement ce même Etat inhumain,
brutal, bureaucratique, policier”; cette machine “qui – comme le dit Marx – non
seulement a subsisté à travers tous les changements mais a été perfectionné et
accrue par chaque changement de régime”. Quand les révolutionnaires se sont
débarrassés de l'Ancien Régime, tout en gardant son mal “acquis”, “la
souveraineté nationale apparut manifestement comme une illusion”.
Selon Weil, “Le
passé n'est que l'histoire de la croissance de
En réalité, ce sont
là des idées auxquelles leurs propagateurs eux-mêmes ne croient pas ou ne
croient plus: leur politique et même leurs dires le prouvent désormais amplement.
Romantisme et mensonges sur la nature non-violente et la mission civilisatrice
du régime que – par l’occupation militaire permanente – l’Espagne et la France
ont établies sur le Peuple Basque et son État: le Royaume de Nabarra, ont leurs
limites dans la structure idéologique même de domination de classe dont le
Nationalisme impérialiste est la forme internationale. Aucun ordre totalitaire
moderne ne pourrait survivre si ses dirigeants croyaient vraiment et mettaient
en pratique eux-mêmes ce qu'ils inventent pour que les autres le croient. Les
National-socialistes espagnols et français (‘si ne suis-je, pourtant, le pire
du troupeau’), et leurs enfants “de gauche”, sont actuellement les groupes qui,
sous la protection de leurs armées d’occupation, sont responsables du
développement et de la mise en œuvre de l’idéologie la plus élaborée qui peut
préserver l’impérialisme de la France et de l’Espagne, et avorter la peste de
la Liberté des Peuples.
Selon la formulation
de Marx-Engels, “La division du travail, dans laquelle nous avons déjà reconnu
un des facteurs les plus importants et les plus puissants de l'histoire, se
manifeste dans la classe dominante également comme division du travail
spirituel et du travail matériel. A l'intérieur de cette classe, l'une des
parties fonctionne comme penseurs de cette classe : ce sont ses idéologues
actifs et conceptifs, qui ont la spécialité de forger les illusions de cette
classe sur elle-même; spécialité dont elles font leur principal gagne-pain. Les
autres gardent, en ce qui concerne ces idées et illusions, une attitude plutôt
passive et réceptive parce qu’ils sont en fait les membres actifs de cette
classe, et ont moins de temps pour faire des illusions et des idées sur
eux-mêmes. Cette scission peut même dégénérer en un certain antagonisme et une
certaine hostilité des deux parties en présence. Mais dès qu’une collision
pratique s’ensôle dans toute la classe, cette opposition disparaît
d’elle-même”. (Cette spécialisation n'étant pas rigidement corporativisée, la
“contradiction” théorique – mais idéologiquement fonctionnelle – se manifeste
aussi en travers et à l'intérieur des groupes et des individus.)
Ils savent tous que
sans cette occupation militaire, et sans les misérables traîtres qui composent
la bureaucratie liquidationniste Pnv-Eta: qui trompent le Peuple Basque depuis
un demi-siècle pour qu’il accepte le régime d’occupation militaire du Second
Franquisme et les États impérialistes et colonialistes espagnol et français,
tels que les régimes et les États “propres, non-Nationalistes, non-violents,
légitimes et démocratiques” ; que sans cette réalité – nous disons –
d’oppression, corruption et abrutissement du Peuple sous les monopoles de la
violence criminelle et d’intoxication idéologique, leur domination ne pourrait
être maintenue. Il est donc temps de présenter les bases idéologiques et
stratégiques qui permettent au Peuple Basque de se libérer de la domination
impérialiste de la France et de l’Espagne, tels qu’ils ont été énoncées dans le
Manifeste du Mouvement Basque de Résistance et de Salut National.
https://nabarrakoerresuma.blogspot.com/2021/03/manifeste-du-mouvement-basque-de.html
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